Sénégal : Ici, on apprend peu de l’Histoire [Opinion du Contributeur]

Au Sénégal, l'histoire se répète souvent. On la voit venir. Elle est si prévisible. Mais ne nous sert à rien. On n’y apprend rien.

Idrissa Seck - Macky Sall

Notre histoire récente, c’est la troisième candidature. Nous sommes en 2010, Idrissa Seck alors membre du comité directeur du Parti démocratique sénégalais (Pds) écrit une lettre au président Wade, de Paris où il se trouvait. Dans cette note largement relayée, il estimait que la candidature de Wade est anti-constitutionnelle et « qu'à 85 ans, il serait trop vieux pour diriger le Sénégal ».

Et Idy de poursuivre avec gravité : « vous avez l’impérieux devoir de rester un exemple, à l’image d’un Mandela ou d’un Lula da Sylva. La possibilité vous est encore offerte de donner une ultime leçon de sagesse à vos compatriotes et au reste du monde. Je vous prie de ne pas la rater, pour garder une mention honorable sur les langues de la postérité ».

Douze ans après, celui qui a été aux avant-postes du combat contre Wade, a participé à la victoire de Macky Sall en 2012 avant de se brouiller avec lui, pour revenir aux affaires plus tard par la force des miracles politiques sénégalais. Après avoir bu le calice de la colère du peuple jusqu’à la lie, Seck se fait entendre après un long silence dont il a le secret. Il prend date. « Je prie pour que les choix futurs que vous aurez à faire, puissent vous valoir un parachèvement de votre parcours déjà exceptionnel, d’une telle beauté, qu’il ne peut avoir d’autre choix que de vous garantir après une longue et heureuse vie auprès des vôtres, une mention honorable sur les langues de la postérité ».

La chute du discours du président du Conseil économique Social et environnemental (Cese) à Thiès, a été on ne peut plus sage. Idrissa Seck qui s’adressait à Macky Sall le président de la République, son « jeune frère », se veut ainsi clairvoyant. Son allocution a été un moment fort pour revenir sur le bilan de l’actuel chef de l’Etat. Un bilan positif à tout point de vue, dit-il.

Idy a tenu à énumérer les bons points de Macky, son allié qu’il a rejoint en pleine période de Covid-19 délassant du coup sa place d’opposant numéro 1, permettant ainsi à Ousmane Sonko de se positionner et de gagner en popularité, en légitimité et en notoriété. Seck est aujourd’hui conscient que Sall est sur une pente descendante. Et que leur alliance n’a pas été fructueuse électoralement parlant. Deux défaites successives à Thiès lors des locales du 23 janvier 2022 et les législatives du 31 juillet 2022. Un impact très peu fameux sur le plan national. Une désillusion totale. Maintenant, le futur proche exige des décisions ici et maintenant. Si Macky ne saisit pas assez le discours d’Idy, le divorce sera consommé. Mais, l’ex-maire de Thiès a la posture idéale de celui qui a posé le débat. Macky devrait pouvoir savoir bien riposter pour ne pas perdre la face. Pour le moment, il fait comme s’il n’avait rien compris, rien entendu.

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Il ne semble retenir que la partie la plus valorisante du discours. Le temps suspend son envol.

L'histoire c’est aussi le 10 février 2023. Comme en mars 2021 (Sen Tv, Walf Tv), Babacar Diagne a encore coupé le signal d'une télévision. Il s'agit cette fois-ci de Walf Tv coupable selon lui d'avoir diffusé les manifestations inhérentes à l'interdiction du meeting d’Ousmane Sonko à Mbacké. Un acte bestial en démocratie, une atteinte grave à la liberté d’expression mais un acte surtout contre-productif et dangereux. Dans un contexte de disruption, un monde brutalement ouvert, il est peu réfléchi de vouloir fermer une télé. A l'ère du smartphone, des réseaux sociaux et des lives, des « liveurs », une telle manière de faire est scélérate.

Mais faut-il reprocher quelque chose au président du Conseil de régulation de l’audiovisuel (Cnra) ? Non. Il est irréprochable. Il a pleinement rempli son statut de "serveur" de présidents. Il a été Directeur de la Télévision nationale sous Diouf, Conseiller puis DG de la Rts sous Wade, Ambassadeur puis DG du Cnra sous Macky. On ne doit aussi rien reprocher à Diouf sanctionné pour son attentisme. Par contre, Wade et Macky nous ont plus déçus. Le président actuel inquiète.

Mais à y regarder de près, ils ont été logiques avec eux-mêmes. Sa volonté de rupture n'était que leurre. Son admiration pour Diouf, pour Bab's et ses méthodes désuètes, ne souffre d'aucune aspérité. Nous autres qui rêvions de rupture dans l'espace médiatique, sommes si naïfs. Aujourd’hui, le pays va vers une implosion. Tous les signaux sont au rouge. La colère gronde. La crise est réelle. Le sentiment d’injustice ou d’une justice partiale prend de l’ampleur. La répétition d’une macabre Histoire est redoutée.

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