5 milliards 694 million 909 mille 156 de FCfa, versés à Henan Chine et Synergies Afrique
L'affaire n'est pas seulement intrigante, elle laisse les magistrats de la Cour des comptes plongés dans un épais brouillard de perplexité. Ce qui interroge d'abord, c'est l’ampleur des sommes englouties en une seule journée de manifestation. Ensuite, c’est le libellé même de la dépense exécutée qui fait froncer bien des sourcils. Pour la seule journée du vendredi 09 février 2024, en lien avec les manifestations de rue qui ont secoué Dakar et provoqué quelques dégâts matériels, l’État du Sénégal a débloqué la somme vertigineuse de 5 milliards 694 million 909 mille 156 de FCfa, versés aux sociétés Henan Chine et Synergies Afrique.
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La date d’émission effectuée 48 heures après l’élection de Diomaye
Un pactole inespéré, présenté dans les documents officiels sous la forme d’«une indemnisation». Mais derrière cet habillage administratif se cache une vraie énigme, presque une incongruité : comment expliquer que des entreprises engagées dans des travaux publics, censées être couvertes par leurs propres polices d’assurance, se retrouvent indemnisées par l’État lui-même ? Un paradoxe qui a, selon des informations de L’Observateur, longuement agité les bureaux de la Cour des comptes et ouvert la voie à de sérieuses interrogations sur la gestion des deniers publics.
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Le plus saisissant dans cette opération financière aux contours troubles, centrée autour de trois Certificats nominatifs d’Obligation (Cno), utilisés pour couvrir une dépense vertigineuse, c’est la date d’émission de ces titres : le 26 mars 2024, soit à peine 48 heures après l’élection présidentielle qui a scellé la défaite de Macky Sall et porté Bassirou Diomaye Faye à la magistrature suprême. Une période censée être marquée par la gestion des affaires courantes et non par des engagements financiers aussi lourds. Mais selon des informations exclusives de L’Observateur, cet argent aurait servi à couvrir des «frais encourus» par Synergies Afrique, qui a perçu la somme faramineuse de 4 milliards 903 millions 843 mille 656 FCfa, et Henan Chine, qui a touché 791 millions 065 mille 500 FCfa.
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Ces montants colossaux seraient justifiés par des dommages prétendument subis lors des émeutes du 9 février 2024. Le rapport ne manque pas de souligner le caractère discutable de cette opération, qualifiée, en termes administratifs, d’«évènements constitutifs de force majeure et d'obligation d’indemnisation à la charge de l’Etat, conformément aux clauses du contrat de marché». Une formulation au parfum juridique soigné, mais qui peine à dissimuler les nombreuses zones d’ombre d’un mécanisme financier enclenché au cœur d’une transition politique.
Ces indemnisations, aussi massives que controversées, ont été accordées dans la foulée des manifestations contre le report de la Présidentielle initialement prévue le 25 février 2024. Une décision brutale, imposée par l’ancien président Macky Sall, qui a déplacé le scrutin au 15 décembre, embrasant tout un pays. Dans les rues, les cris de colère ont résonné plus fort que les discours institutionnels. Des commerces ont été pillés, des vitres brisées, mais surtout, du sang a coulé. Celui d’Alpha Yoro Tounkara, jeune étudiant en deuxième année de licence de géographie à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis.A
Avec L'OBS