La contrainte par corps ou la prison pour dette !

Cette sanction prévue dans le code de procédure pénale n'est pas sans connaitre aucune limite.

Palais de Justice de Dakar

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Prévue par le code de procédure pénale en ses articles 709 et suivants, la contrainte par corps est un moyen de pression qui permet à un créancier d’amener son débiteur récalcitrant à honorer son engagement à travers l’emprisonnement après une décision de justice. Elle constitue une alternative à la saisie et à la vente des biens de la personne qui est dans l’impossibilité de payer une dette qui pèse sur elle.

À cet effet, le créancier recourt à un huissier de justice qui va notifier à son débiteur qu’il doit respecter la décision rendue par le tribunal le condamnant au paiement. S’il ne réagit pas, l’huissier va dresser un procès-verbal de carence qui doit être déposé auprès du parquet. Le procureur lance un mandat d’arrêt contre le débiteur qui est interpellé et emprisonné.

À la lumière de cette précision, il apparait clairement que la mesure est aménagée dans le but d’aider la personne qui fait face à des difficultés dans le recouvrement de sa créance.

Cette logique protectrice qui corrobore la force obligatoire des engagements contractuels, est malheureusement édulcorée par des tares qui limitent considérablement son efficacité.

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Du point de vue de l’âge du débiteur défaillant, la loi précise que « la contrainte par corps ne peut jamais être appliquée contre des condamnés mineurs de moins de dix-huit ans, ni contre ceux qui ont commencé leur soixante-dixième (70) année au moment de la condamnation ». Ceci constitue une limite dans la mise en œuvre de la procédure et par ricochet une atteinte au droit du créancier.

Sur le plan financier, il appartient à ce dernier de nourrir le débiteur durant toute la période de l’emprisonnement. Le créancier est tenu de verser une pension alimentaire de 1000 F CFA par jour. Cela revient tout simplement à dire que s’il ne peut pas supporter cette obligation, la procédure ne lui est pas ouverte. Une autre atteinte de son droit organisée maladroitement par la loi elle-même.

À cela, il convient d’ajouter que la durée de la détention ne peut pas dépasser deux (2) ans. Ainsi si la personne ne parvient pas à rembourser la dette ou n’a fait aucune proposition sérieuse de remboursement, à l’expiration de ce délai sa libération devient automatique.

La conjonction de ces facteurs handicape considérablement l’application de la mesure. Cela a poussé certains pays à la supprimer de leur système juridique, c’est le cas de la France.

À défaut d’abolir la contrainte par corps, le législateur Sénégalais doit revoir les contours de la procédure pour davantage protéger les citoyens face aux mauvais payeurs.

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