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Tamkharit et Thiéré : quand la tradition sénégalaise s’invite dans la sunna

Chaque année, le Sénégal célèbre la Tamkharit, correspondant au 10e jour du mois de Muharram, appelé Achoura dans le calendrier musulman. Si cette date est sacrée dans l’islam, la façon dont elle est célébrée varie selon les pays. Au Sénégal, c’est aussi une fête de famille où le thiéré (couscous local) est à l’honneur. Mais est-ce une obligation religieuse ou une tradition culturelle ?
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La Tamkharit, célébrée cette année encore avec faste dans de nombreux foyers sénégalais, puise son origine dans la fête d’Achoura, une date importante dans le calendrier islamique. Elle marque le 10e jour du mois de Muharram, premier mois de l’année musulmane. Au Sénégal, le thiéré occupe une place centrale dans les célébrations de Tamkharit. Bien plus qu’un simple plat, il incarne le partage, la prospérité et l’unité familiale. Sa préparation, souvent confiée aux femmes, mobilise savoir-faire, patience et transmission intergénérationnelle. Tôt le matin, mères, tantes, filles et voisines se réunissent pour rouler la semoule à la main, parfumer les sauces, et veiller à ce que chaque foyer riche ou modeste ait son bol de thiéré.

Tamkharit et Thiéré : quand la tradition sénégalaise s’invite dans la sunna

Une signification religieuse forte

Dans la tradition musulmane, le prophète Muhammad (PSL) aurait observé le jeûne ce jour-là, en souvenir du prophète Moïse (Moussa), sauvé de Pharaon avec son peuple. Lorsqu’il apprit que les juifs de Médine jeûnaient ce jour pour commémorer cet événement, il déclara « Nous avons plus de droit sur Moïse qu’eux » et recommanda à ses compagnons de jeûner. Ainsi, le jeûne du jour d’Achoura est fortement recommandé (sunna mouakkada) dans l’islam. Il est même conseillé de le précéder du jeûne du 9e jour (Tâssou’a) pour se distinguer des juifs.

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Et le thiéré dans tout ça ?

Au Sénégal, Tamkharit est aussi une fête familiale marquée par la préparation du thiéré (couscous), souvent accompagné de viande, de poulet ou de sauce rouge. Ce plat, symbole de prospérité et de partage, est largement perçu comme une tradition culturelle sénégalaise. D’un point de vue religieux, rien dans les textes islamiques ne prescrit la préparation de thiéré ou d’un quelconque plat spécifique pour célébrer Achoura. Il ne s’agit ni d’une obligation religieuse, ni d’une recommandation prophétique. C’est donc une coutume ancrée dans la culture locale, comme le sont les chants, déguisements d’enfants (notamment chez les jeunes garçons imitant des figures religieuses), et les bénédictions échangées en famille.

Tamkharit et Thiéré : quand la tradition sénégalaise s’invite dans la sunna

Une fête au carrefour de la foi et de la culture

La Tamkharit au Sénégal illustre bien l’entrelacement entre rites religieux et expressions culturelles locales. Si la base spirituelle est bien fondée dans l’islam, sa célébration festive avec thiéré, chants et retrouvailles est propre au patrimoine sénégalais.

Ainsi, la vraie recommandation religieuse reste le jeûne et, éventuellement, les prières et invocations. La fête autour du thiéré est une manifestation culturelle qui accompagne l’événement, mais ne le définit pas religieusement. Même si c'est pas une recommandation religieuse , le thiéré reste une véritable chorégraphie culinaire et solidaire, qui fait de la cuisine un espace de lien social autant que de dévotion. À travers ce plat, les femmes perpétuent une tradition profondément sénégalaise, qui lie la foi à la générosité.

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