Alors que WalfQuotidien fêtait la parution de son 10 000e numéro, l’heure n’était pas à la fête au sein du groupe de presse fondé par feu Sidy Lamine Niass. À cette occasion hautement symbolique, Me Cheikh Niass, actuel PDG de Walfadjri, a choisi de prendre la parole pour évoquer, sans fard, les difficultés profondes que traverse son entreprise. Son discours, à la fois lucide et alarmant, résonne comme un cri d’alerte adressé à l’État et à l’ensemble des acteurs du paysage médiatique sénégalais.
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Une pression fiscale asphyxiante
Dans son adresse, Me Cheikh Niass a d’abord dénoncé la pression fiscale « inédite et violente » qui pèse sur les épaules du groupe. Selon lui, les exigences de l’administration fiscale sont devenues difficilement soutenables pour une entreprise de presse en crise. À cela s’ajoute le non-versement de l’aide à la presse, gelée depuis plus de 15 mois, qui prive Walfadjri comme d'autres organes d’un soutien pourtant vital dans un secteur structurellement fragile. « Cela fait bientôt sept ans que je suis aux commandes du groupe, mais c’est avec la récente alternance politique que je mesure réellement le défi immense de pérenniser un groupe de presse comme Walfadjri », a-t-il déclaré avec gravité.
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Une survie au jour le jour
Le dirigeant n’a pas masqué l’ampleur des difficultés financières que connaît le groupe. Selon lui, Walfadjri fonctionne littéralement à découvert depuis plusieurs mois. Ce qui permet encore au média de tenir debout, ce sont les facilités bancaires et la compréhension de ses partenaires financiers. « Sans leur soutien, nous aurions déjà commencé à accumuler des arriérés de salaires, comme c’est malheureusement le cas dans d’autres maisons de presse », a-t-il précisé. Un aveu qui témoigne d’une gestion de crise permanente, et d’un équilibre devenu précaire, voire instable. Malgré les efforts internes pour maintenir la production éditoriale, l’érosion des ressources publicitaires, notamment celles provenant des institutions publiques, creuse un peu plus chaque jour le gouffre dans lequel risquent de s’engouffrer les médias indépendants.
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Un malaise général dans la presse
Cheikh Niass
Au-delà du cas particulier de Walfadjri, Cheikh Niass met en lumière une crise plus large qui touche l’ensemble de la presse sénégalaise. Il évoque une forme de marginalisation économique des médias privés, traduite par la raréfaction des contrats de communication de l’État, la défiance de certaines autorités envers les patrons de presse, et l'absence d'une politique claire de soutien au secteur. « De mémoire de jeune entrepreneur, jamais je n’ai connu autant de difficultés à honorer les charges fixes de l’entreprise que durant ces derniers mois », a-t-il reconnu. Dans un contexte de réorganisation politique post-alternance, plusieurs acteurs du secteur estiment que les médias indépendants paient le prix de leur liberté de ton ou de leur passé éditorial. Pour Cheikh Niass, ce climat délétère risque d’affaiblir durablement un pilier fondamental de la démocratie : la presse libre.
Un Appel à un sursaut collectif
Face à cette situation préoccupante, le patron de Walfadjri lance un appel à l’État, mais aussi à l’opinion publique et aux partenaires du secteur privé, pour un véritable sursaut. Il plaide pour un soutien structurel à la presse, davantage basé sur des critères objectifs, et pour une meilleure redistribution des ressources publicitaires publiques, souvent accaparées par quelques groupes. « Nous avons besoin de réformes profondes et de règles du jeu claires pour que les entreprises de presse puissent survivre sans se compromettre », a-t-il conclu.