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L’insolence musicale : Quand les artistes sénégalais flirtent avec la vulgarité

De plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer le langage osé, parfois grossier, utilisé par certains artistes musiciens sénégalais. Des chansons populaires comme Mia de Ndakhté Lo ou certains titres de Sidy Diop et Baye Masse suscitent la controverse. À travers des paroles jugées indécentes, ces artistes sont-ils en train de pervertir la jeunesse ou simplement de refléter une réalité sociale sans filtres ?

Depuis quelques années, la scène musicale sénégalaise est marquée par une nouvelle génération d’artistes qui n’hésitent plus à casser les codes de la bienséance. Avec des textes crus, parfois provocateurs, ces musiciens attirent l'attention, mais aussi la critique. Le morceau de Mia ou de Ndakhté en est un exemple frappant, avec des paroles qui choquent autant qu'elles fascinent. Sidy Diop, pourtant connu pour son charisme et son aura dans le mbalax, glisse parfois dans des expressions peu convenables, et Baye Masse, figure montante, n'est pas en reste.

Ces choix artistiques suscitent une double lecture. D’un côté, certains défendent ces textes au nom de la liberté d’expression et de la volonté de briser les tabous. La musique serait alors un miroir brut de la société, et ces mots choquants ne seraient que le reflet d’une réalité souvent tue. De l’autre, beaucoup s’alarment de l’impact de ces paroles sur une jeunesse déjà confrontée à des défis identitaires et sociaux. En banalisant des expressions vulgaires ou à connotation sexuelle, ces chansons risqueraient de banaliser l’irrespect et la provocation.

Le duo Sidy Diop et Baye Masse

Le clip « Motema » de Sidy Diop et Baye Mass a suscité de nombreuses réactions, notamment à cause de son contenu jugé vulgaire par une partie du public sénégalais. Le morceau mélange ambiance festive et expressions à connotation suggestive, voire crue. Certains passages du texte sont interprétés comme des sous-entendus sexuels, et la chorégraphie du clip, avec des danseuses aux mouvements provocateurs, accentue cette perception. Le mot « Motema », qui signifie « complet» en français, est ici utilisé dans un contexte qui semble bien plus axé sur la séduction charnelle que sur les sentiments.

Mia Guissé

Ses chansons, qui flirtent avec des thèmes sexuels et utilisent un langage cru, suscitent l’inquiétude chez une partie de la société qui craint une perversion des jeunes auditeurs. En parallèle, son style vestimentaire audacieux, souvent très dénudé, est fréquemment critiqué dans les médias et par des leaders d’opinion, qui y voient une provocation inutile, voire une atteinte aux valeurs culturelles sénégalaises. Mia Guissé, quant à elle, défend sa liberté d’expression et affirme que son image reflète sa personnalité et son époque. Cette dualité entre modernité et conservatisme met en lumière les tensions profondes qui traversent la société sénégalaise autour de la musique et des normes sociales.

Ndakhté Lo

Le dernier titre de Ndakhté Lo, bien qu’empreint de rythmes modernes et d’émotions, a suscité des critiques quant à certains passages jugés vulgaires ou trop suggestifs. Les paroles, parfois directes sur des thèmes intimes, ont été perçues par une partie du public comme une rupture avec la tradition de retenue souvent attendue chez les artistes sénégalais. Par ailleurs, le style vestimentaire de Ndakhté Lo, souvent provocateur et dénudé, alimente le débat. Dans ses clips et apparitions publiques, elle adopte une image assumée, mêlant sensualité et modernité, ce qui dérange certains observateurs qui y voient une transgression des normes culturelles sénégalaises. À travers cette posture, Ndakhté Lo semble vouloir redéfinir les limites de la liberté artistique, mais elle se confronte aussi à une société en pleine tension entre conservatisme et ouverture.

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L’influence des artistes sur les jeunes est indéniable. Dans un contexte où les réseaux sociaux amplifient la portée de chaque mot, chaque clip, la question de la responsabilité artistique devient centrale. Peut-on se réclamer d’un art populaire tout en négligeant l’impact éducatif de sa musique ? Où s’arrête la liberté de création, et où commence la perversion des mœurs ?

Loin de vouloir censurer la création artistique, il s’agit plutôt d’ouvrir un débat sur les limites du langage dans la musique, et sur le rôle que doivent jouer les artistes dans la construction des repères culturels et moraux de la jeunesse. L'insolence peut être un outil de dénonciation, mais lorsqu'elle devient gratuite et systématique, elle risque de perdre tout pouvoir de critique pour ne devenir qu’un simple choc sans message.

L’évolution de la musique sénégalaise, portée par des artistes comme Ndakhté Lo, Mia Guissé, Sidy Diop ou Baye Mass, reflète une jeunesse en quête d’expression libre et d’affirmation. Pourtant, le recours à des paroles parfois vulgaires et à des images provocantes soulève des interrogations légitimes sur l’impact de ces choix artistiques. Si la musique doit rester un espace d’innovation et de rupture, elle n’en demeure pas moins un puissant vecteur de valeurs et de modèles pour les jeunes générations. Il appartient donc aux artistes, mais aussi aux médias et à la société dans son ensemble, de trouver un équilibre entre liberté créative et responsabilité sociale, afin de préserver l’essence culturelle tout en embrassant la modernité.

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