Un climat de censure grandissant
Depuis plusieurs mois, les autorités sénégalaises multiplient les mesures de répression à l’encontre des médias jugés "non reconnus", souvent accusés d’opérer sans autorisation officielle ou de diffuser des contenus jugés subversifs. Cette vague de fermetures, largement dénoncée par les organisations de défense de la liberté de la presse, s’est accentuée à l’approche du 1er mai, limitant ainsi la couverture des manifestations, des revendications syndicales et des débats sociaux.
Pour le journaliste Cheikh Ahmed Tidiane Ndiaye joins par téléphone, "ces mesures ont conduit à la fermeture de nombreux médias jugés illégaux, entraînant une augmentation du chômage parmi les journalistes. La situation économique difficile de la presse sénégalaise, due aux impôts et autres facteurs, rend difficile pour les médias restants de recruter ces journalistes au chômage. Ces régulations aggravent la crise pour les journalistes qui dépendent uniquement de leur profession." a t-il expliqué.
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Des travailleurs privés de voix
Traditionnellement, la fête du Travail est une occasion pour les travailleurs sénégalais d’exprimer leurs préoccupations : pouvoir d’achat, conditions de travail, emploi des jeunes, sécurité sociale… Or, sans relais médiatique indépendant pour porter ces revendications, de nombreuses voix sont restées inaudibles. Plusieurs syndicats ont d’ailleurs exprimé leur frustration, dénonçant un étouffement médiatique qui nuit au dialogue social.
Des conséquences sur la démocratie
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Au-delà de la fête du 1er mai, cette tendance à la fermeture et au contrôle des médias interroge sur l’état de la démocratie sénégalaise. Dans un pays longtemps perçu comme un modèle en Afrique de l’Ouest, la liberté de la presse semble désormais vaciller. Les médias non reconnus, souvent les seuls à relayer certaines opinions dissidentes ou à couvrir les mouvements citoyens, jouent pourtant un rôle crucial dans le pluralisme de l’information.
Appels à la réouverture et à la régulation équitable
Des voix s’élèvent pour réclamer non seulement la réouverture des médias fermés, mais aussi la mise en place d’un cadre réglementaire plus transparent et équitable. Car si la régulation est nécessaire, elle ne saurait être un outil de censure. Dans ce contexte tendu, la protection des libertés fondamentales, notamment celle d’informer et d’être informé, reste un enjeu majeur pour l’avenir du pays.
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Face à cette situation, la majorité des médias concernés ainsi que plusieurs organes de presse solidaires adoptent une posture de dénonciation et de résistance. Voici les grandes lignes de leur position :
1. Dénonciation d’une atteinte à la liberté de la presse
Les médias fermés ou menacés dénoncent une volonté manifeste des autorités de restreindre l’espace médiatique indépendant. Ils considèrent ces fermetures comme arbitraires et politiquement motivées, notamment à l'approche de périodes sensibles comme le 1er mai ou les échéances électorales.
2. Appels à la solidarité nationale et internationale
Plusieurs rédactions appellent à la mobilisation de la société civile, des syndicats de journalistes, mais aussi des partenaires internationaux (comme Reporters Sans Frontières ou le Comité pour la Protection des Journalistes), pour exercer une pression sur l'État sénégalais.
3. Revendication d’un cadre légal clair et équitable
Les médias concernés ne rejettent pas l’idée de régulation, mais exigent que celle-ci soit fondée sur des critères transparents, respectueux du pluralisme et non instrumentalisée à des fins de contrôle politique.
4. Adaptation et contournement numérique
Certains médias utilisent désormais les plateformes en ligne et les réseaux sociaux pour continuer à diffuser leurs contenus, contournant ainsi les fermetures physiques ou administratives. Cette résistance numérique est toutefois souvent entravée par des restrictions d’accès ou des blocages ponctuels d’internet.
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La fermeture des médias ne touche pas seulement à la liberté d’expression, elle a aussi des conséquences économiques directes, notamment sur l’emploi dans le secteur de la presse et de la communication. Voici un ajout que vous pouvez intégrer dans votre article :
Fermeture des médias : une menace silencieuse sur l’emploi dans le secteur
Au-delà des enjeux démocratiques, la fermeture des médias non reconnus a aussi des répercussions graves sur le plan économique. Des dizaines, voire des centaines de journalistes, techniciens, animateurs, cameramen et agents administratifs se retrouvent brutalement sans emploi, souvent sans indemnités ni solutions de reclassement.
Dans un contexte où le chômage, notamment des jeunes diplômés, reste élevé au Sénégal, cette fragilisation du secteur médiatique vient aggraver une situation déjà préoccupante. Pour beaucoup de professionnels, ces fermetures représentent un double choc : la perte d’un revenu et la remise en question de leur vocation.
Selon le journaliste du Soleil Cheikh Ahmed Tidiane Ndiaye, ce qui « tue plus le reporteur » est l'ajout de la régularisation à la crise économique que traverse déjà la presse sénégalaise. Il explique que les médias font face à une crise économique significative, mentionnant notamment : le taux d'imposition (les impôts), le redressement fiscal. "Beaucoup de choses" qui contribuent à cette crise . L'obligation pour les médias de se régulariser, imposée par le nouveau dispositif du régime en place, vient s'ajouter à ces difficultés économiques déjà existantes.
Les syndicats de la presse appellent ainsi à une prise de conscience des autorités : derrière chaque média fermé, ce sont des familles entières qui sont impactées. La liberté d’informer ne saurait être défendue sans garantir aussi la survie économique de ceux qui la portent au quotidien.
La fermeture des médias non reconnus au Sénégal soulève des inquiétudes profondes, tant sur le plan démocratique qu’économique. En muselant des canaux essentiels de l’expression citoyenne, c’est la voix des travailleurs, des syndicalistes, mais aussi des citoyens ordinaires qui se trouve étouffée. À cela s’ajoute un impact social concret : la montée du chômage dans un secteur déjà fragile. Face à ces dérives, il devient urgent de repenser la régulation des médias dans un esprit de justice, de transparence et de respect des libertés fondamentales. Car sans une presse libre et vivante, la démocratie elle-même vacille