L'enquête sur sur la gestion nébuleuse des finances publiques dans la période 2019-2024 s'emballe. Le parquet financier a confié à la DIC l'enquête sur la gestion nébuleuse des finances publiques par des miinstres ayant servi entre 2019 et 2024. Les enquêteurs de la Dic passent au crible un premier lot de près d’une dizaine de dossiers à scandale incriminant de hauts fonctionnaires de l’État.
D'après L'OBS, le Premier Président de la Cour des comptes, Mamadou Faye a dressé la liste des faits et des figures à poursuivre, si leur responsabilité venait à être établie. En plus de porter à la connaissance du ministre de la Justice des constats consignés dans le document et susceptibles de motiver l’ouverture de procédures pénales, le haut magistrat a joint à sa lettre un dossier brûlant portant les pièces déclassées sur des comptes bancaires mouvementés par les ministres et d’anciens ministres délégués chargés des Finances.
Dans ce paquet explosif, un dossier en particulier attire tous les regards de ceux qui ont eu à le parcourir : l’affaire de l’ouverture de plusieurs Dépôts à terme (DAT), qui pourraient être assimilés à des comptes d’épargne ou l’argent est placé dans une banque pour une durée déterminée à l’avance (par exemple 3, 6 ou 12 mois), pendant laquelle les fonds ne peuvent normalement pas être retirés. Et dans cette affaire concernant l’ancien ministre Amadou Ba, c’est le montant vertigineux de 141 087 194 249 F Cfa qui est mis en cause.
)
L'ex DG du Trésor également visé
Amadou Ba a ouvert et cassé la majorité des Dépôts à terme (DAT) visés
Et selon la Cour des comptes, quasiment tous les Dépôts à terme ont été «cassés». C’est-à-dire retirés avant la date d’échéance prévue dans le contrat, sans jamais être reversés dans les caisses du Trésor public. Aux côtés de Amadou Ba, figure le nom de Cheikh Tidiane Diop, ancien Directeur général du Trésor, et Secrétaire général du ministère des Finances au moment des faits. En toile de fond, une autre ombre plane. Celle du Trésorier général de l’époque, dont l’identité reste, pour l’heure, à confirmer parce que le poste a connu des nominations. Selon le référé, plus détaillé que le rapport publié en ligne par la Cour des comptes, il est établi que l’ancien ministre des Finances, Amadou Ba, a ouvert et cassé la majorité des Dépôts à terme (DAT) visés par l’enquête.
)
A titre d’exemple, la lettre n°579 MEFP/DGCPT/TG en date du 30 juin 2016, signée par Amadou Ba alors ministre de l’Économie, des Finances et du Plan, concerne un montant de 4,107 milliards de FCfa, pour un taux d’intérêt de 3,5 % par an, bien que l’objet de l’opération ne soit pas précisé. Selon la Cour des comptes, après interpellation de la BRM par le Trésorier général, la banque a indiqué que ce DAT avait servi à rembourser l’escompte d’un billet à ordre le 2 mai 2017. Ce que l’enquête compte déterminer. Un autre exemple figure dans la lettre n°00042 du 3 juin 2015, signée par M. Cheikh Tidiane Diop, alors Secrétaire général du ministère des Finances. Elle s’appuie sur un protocole d’accord de règlement de créances et dettes croisées entre l’État du Sénégal, la Sonatel et la BRM, signé par Amadou Ba, pour un DAT d’un montant de 6,525 milliards de FCfa, à un taux d’intérêt de 3,5 % par an.
Selon la Cour des comptes, c’est l’examen des pièces justificatives recueillies auprès de la Trésorerie générale et des établissements financiers dépositaires qui a révélé que des DAT sont virés à des tiers, sur instruction des ministres chargés des Finances ou des ministres délégués chargés du Budget. Il convient de préciser que l’habilitation faite aux ministres chargés des Finances d’autoriser l’ouverture de comptes à la Bceao ou dans les banques commerciales pour y déposer les fonds du Trésor public n’emporte pas, pour eux, licence pour manier les deniers. En effet, le décret n°2011- 1880 du 24 novembre 2011 portant Réglement général sur la Comptabilité publique, qui était applicable au moment de la constitution de certains de ces dépôts à terme, précise bien en son article 125 que «seuls les comptables deniers et valeurs sont habilités à manier les fonds du Trésor public».
)
De plus, en donnant à un établissement financier l’ordre d’utiliser les Dépôts à terme d’un comptable public pour payer des dépenses non autorisées, des ministres chargés des Finances ou des ministres délégués chargés du Budget ont irrégulièrement engagé l’Etat, en dehors des lois de finances. Du reste, la comptabilité du Trésor est conçue de telle sorte que le compte relatif aux dépôts à terme ne peut être soldé que par la reconstitution, dans les livres du comptable public déposant, de la trésorerie qu’il avait placée en banque. En effet, la qualité de deniers publics à un caractère indélébile et ne peut être perdue que lorsqu’ils ont été employés pour leur usage normal qui est d’éteindre une dette publique régulière.
C’est quoi un Dat ?
Le dépôt à terme (Dat) est une somme d’argent bloquée dans un compte bancaire et productive d’intérêts au bout de l’échéance fixée dans la convention y relative. Il a vocation à être restitué au comptable public déposant à l’échéance convenue. (…) En ordonnant à un établissement financier d’utiliser ces dépôts à terme pour payer des dépenses non autorisées, les ministres concernés ont engagé l’Etat en dehors des lois des finances. Une situation qui empêche l’apurement du compte de dépôt à terme qui ne peut être soldé que par la reconstitution, dans les livres du comptable public déposant, de la trésorerie qu’il avait placée en banque.