Après le tollé suscité par l'affaire Adji Sarr, aujourd’hui, Gabrielle Kane pose le pied dans le secteur audiovisuel. Productrice de «Debbo», la série réalisée par Abdoulahad Wone et sélectionnée au 29e Fespaco, Gabrielle Kane, dans un entretien avec L'OBS, réaffirme son engagement en faveur des femmes. Féministe, elle apporte, à travers cette œuvre, une réponse à la mauvaise image que, selon elle, le secteur audiovisuel sénégalais donne de la femme.
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Pourquoi Debbo ?
Elle explique : "Le choix du titre Debbo s’est imposé naturellement, parce que cette série parle avant tout de femmes, de leurs vies, de leurs épreuves, de leurs vérités. Debbo, en Pulaar, signifie «femme», et c’est aussi un clin d’œil à mes origines Haal Pulaar. C’est un mot qui me définit intrinsèquement, qui me relie à une identité, à une culture. Je n’ai pas cherché à «incarner» quoi que ce soit, parce qu’au Sénégal, incarner devient souvent un fardeau. On attribue des symboles, des postures, qui finissent par déformer le message initial. Moi, je voulais simplement raconter. Debbo n’est pas une œuvre de posture, c’est une œuvre de vérité. J’ai puisé dans des récits réels, des confidences de femmes croisées, des fragments de vie que j’ai moi-même vécus ou observés. Dans un contexte où la société sénégalaise débat encore de la place et du rôle de la femme, Debbo vient poser un regard honnête, sans artifices, sur ce que vivent les femmes."
Elle ajoute : "Debbo est, par essence, une série engagée. Mais c’est un engagement qui se vit à travers des histoires profondément humaines, des trajectoires de femmes à la fois puissantes et fragiles, fortes et brisées. Ces récits sont le reflet de celles que je côtoie au quotidien. Je ne fais pas les choses pour faire. Ce qui m’a particulièrement touchée, c’est que cet engagement a transcendé toute l’équipe, chacun s’est senti investi d’une mission. C’est cette cohérence humaine, cette énergie partagée, qui donne à Debbo son authenticité et sa force émotionnelle."
"On a fini par dénaturer la femme sénégalaise"
"Depuis, j’observe avec un certain agacement la manière dont les femmes sont représentées dans nos productions audiovisuelles : souvent réduites à leur apparence, à leur beauté physique, comme si leur valeur se limitait à l’esthétique. Cette approche est non seulement réductrice, mais dangereuse, car elle façonne les mentalités. Elle alimente des modèles artificiels et impose aux jeunes filles des standards inaccessibles. Ce qui me dérange le plus, c’est cette forme de propagande implicite autour de la dépigmentation, de la superficialité, du paraître. À force de mettre en avant ce type d’images, on finit par dénaturer la femme sénégalaise, par trahir son authenticité."