Pulse logo
Pulse Region

Les détails de l’enquête qui "coulent" Ismaïla Madior Fall

C'est l’assiette foncière du site du tribunal de Pikine-Guédiawaye (8000 ha) qui est à l’origine de la tentative de traduction de l’ancien ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall, devant la Haute cour de justice. Le promoteur Cheikh Guèye, gérant de la société Technologie Consulting Service (TCS), l’accuse de lui avoir réclamé 250 millions FCfa pour bénéficier de contrats.
Ismaila Madior Fall
Ismaila Madior Fall

On en sait un peu plus sur les faits reprochés à l’ancien ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall. Des faits qui risquent de lui valoir un passage devant la Haute cour de justice. Selon les infos de L’OBS, tout est parti d’une histoire de promesse de 250 millions FCfa et de remise de 50 millions FCfa, quand les nouveaux locaux du Tribunal de grande instance de Pikine-Guédiawaye ont été délocalisés sur la VDN. Dès son installation, le procureur de la République de cette juridiction, Saliou Dicko, a reçu la visite des membres du collectif Baïdy Sèye. Ce collectif dispose d’un lotissement proche de l’assiette foncière du tribunal de Pikine-Guédiawaye. Ses membres ont expliqué au Procureur que le site du Tribunal avançait vers leur site.

 Pour faire la lumière, le procureur Saliou Dicko a saisi la Division des investigations criminelles (Dic) pour l’ouverture d’une enquête. Il demande aux hommes du redoutable enquêteur El Hadj Baïdy Sène, chef de la Dic, d'ouvrir une enquête exhaustive et diligente aux fins de déterminer la superficie exacte utilisée pour la construction du Palais de Justice Pikine-Guédiawaye, l'usage qui a été réservé à ce qui restait de l'assiette consentie au ministère de la Justice, les conditions dans lesquelles cet accord est intervenu et l'état actuel de la superficie cédée à cette dernière en vue d'indiquer si cette entité qui n'aurait pas honoré ses engagements en érigeant le Centre de contrôle électronique, n'a pas commencé à effectuer des transactions ou à mettre en valeur l'espace qui lui a été consenti.

Les détails de l’enquête de la BAG

Le Procureur Dicko voulait aussi savoir les motivations d'ordre financier ou de toute autre nature qui ont amené les personnes impliquées à signer une convention qui n'a pas été mise en œuvre. Par la même occasion, il a saisi la Dic pour une enquête contre Cheikh Guèye, représentant de la société Technologie Consulting Service (TCS) et éventuellement toute personne impliquée, relativement à l'accaparement de cette assiette foncière du Tribunal Pikine Guédiawaye. La machine de la Dic est mise en marche. Si c’est le commissaire El Hadj Baïdy Sène qui supervisait l’enquête, cette dernière a été menée rigoureusement par le chef de la Brigade des affaires criminelles de la Dic, le commissaire Cheikh Sadibou Diallo.

Ce dernier, fin investigateur, a mené un travail qui, au-delà des demandes du Procureur Saliou Dicko, devait débusquer des faits d’association de malfaiteurs, d’escroquerie foncière et de blanchiment de capitaux. Le commissaire Diallo découvre que c’est par le décret n°2020-1281 du 08 Juin 2020 que l'Etat a affecté au ministère de la Justice une assiette foncière de 2 hectares 85 ares 14 centiares sur le plan d'Urbanisme de Développement (Pud) de Guédiawaye pour réaliser le Palais de Justice de Pikine-Guédiawaye.

Pour ce faire, l'ancien ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall, a signé avec Cheikh Guèye un protocole dans lequel, ce dernier devait construire le Centre de Surveillance Electronique sur 2 075 m2 de l'assiette foncière précitée. Le montant prévisionnel des travaux était estimé à 576 millions FCfa, en contrepartie d'un paiement en dation sur 9 598 m2 de ladite assiette foncière, selon des éléments de l’enquête. Elle révèle que la répartition de l'assiette du Tribunal devait se faire comme suit : 8327 m2 pour le Palais de Justice, 2075 m2 pour le Centre de Contrôle Electronique et 9 598 m2 pour le promoteur Cheikh Guèye. Mais, le 16 mai 2023, le protocole précité, présenté à la Commission de Contrôle des Opérations Domaniales (CCOD) pour avis, a été retiré pour complément d'informations sur sa mise en œuvre. Malgré cette décision, des baux ont été attribués au promoteur et à d'autres personnes non identifiées sur le lotissement constitué de trente-six (36) parcelles établies sur une partie de l'assiette foncière du Tribunal.

L’arrêté de résiliation du Ministre n'a pas été notifié au susnommé

Dans la même veine, le 23 novembre 2023, la CCOD a demandé la résiliation du bail irrégulier attribué à Cheikh Guèye, mais l'arrêté de résiliation du Ministre n'a pas été notifié au susnommé. Mieux, les constatations physiques effectuées par le Procureur Saliou Dicko, une équipe d'enquêteurs de la Dic et celle du cadastre de Guédiawaye, ont permis de savoir que le promoteur Cheikh Guèye n'a pas réalisé le centre de surveillance de bracelets électroniques. C’est dans ce sens que Mohamed Anas El Bachir Wane, ancien Directeur de la Construction du Ministère de la Justice, a été convoqué et entendu dans le cadre de l’enquête. Il a expliqué aux enquêteurs que lorsqu'il a pris fonction en mars 2022, il a saisi par correspondance le Directeur des Domaines et le Chef du Bureau des Domaines de Guédiawaye pour faire l’état des lieux sur l'assiette foncière d'une superficie de 02 h 85 a 14 ca, attribuée au Ministère de la Justice. Cependant, il dit n’avoir eu aucune réponse.

Lire plus : https://www.pulse.sn/articles/news/ismaila-madior-fall-au-coeur-dune-affaire-de-corruption-presumee-2025042408115813754

Les graves accusations du promoteur contre le ministre et son directeur des constructions

Sommé de dire s'il avait déposé le bail de 9 430 m2 en guise d'hypothèque dans une quelconque banque de la place, Cheikh Gueye a révélé qu'il avait introduit ledit bail auprès de la banque LBA ex-CNCA pour un prêt de 2 milliards FCfa, mais la banque a refusé. Sur le rejet de son dossier de bail par la Commission de Contrôle des Opérations Domaniales (CCOD) en sa séance du 16 mai 2023, Cheikh Guèye a répondu par la négative, en précisant, au passage, qu'au cours de la procédure d'obtention du bail, il n'a fourni aucun document. Il a précisé que c'est le ministre Ismaïla Madior Fall et son Directeur des Constructions, Mohamed Anas El Bachir Wane qui avaient tout géré pour lui. Lui n’a fait que récupérer le bail. Les investigations des hommes d’El Hadj Baïdy Sène permettent de découvrir qu’en septembre 2023, il a reçu un message du Ministre l'informant de l'annulation de son bail, mais aucune notification ne lui a été faite jusqu'à ce jour.

Poursuivant, Cheikh Gueye a révélé que pour bénéficier auprès du ministre de la Justice Ismaïla Madior Fall du protocole d'accord pour la réalisation du Centre de Surveillance de Bracelets Electroniques, ce dernier lui a réclamé la somme de 250 millions de FCFA. Devant les enquêteurs, Cheikh Guèye affirme avoir remis à ce dernier un acompte de 50 millions Fcfa en espèces dans son bureau, en présence de son Directeur des Constructions, Mohamed Anas El Bachir Wane. Il raconte que quelque temps après cette remise, Ismaïla Madior Fall insistait pour qu'il lui remette les 200 millions FCfa restants, mais il avait refusé au regard des lenteurs dans la délivrance de son bail. C'est par la suite que le ministre lui a retourné ses 50 millions FCfa.

Par ailleurs, les enquêteurs ont aussi découvert que le bail de Cheikh Guèye n’a jamais été annulé. Ils précisent que c’est un décret du président de la République Bassirou Diomaye Faye qui a repris le site qui l’a annulé en même temps. En plus, les enquêteurs ont obtenu la confirmation que c’est sur la base des rapports de la Commission de Contrôle des Opérations Domaniales (CCOD) que le bail a été établi.

Abonnez-vous pour recevoir des mises à jour quotidiennes.