Au Sénégal, l’avortement est strictement interdit, sauf en cas de danger pour la vie de la mère. Cette législation restrictive pousse de nombreuses femmes à recourir à des méthodes clandestines, souvent dangereuses, pour interrompre une grossesse non désirée.
Une législation restrictive et ses conséquences
Le Code pénal sénégalais criminalise l’avortement, avec des peines allant de six mois à deux ans d’emprisonnement pour la femme qui se procure un avortement, et de cinq à dix ans pour les personnes qui l’aident ou le pratiquent. Cette législation contraignante conduit à des pratiques d’avortement non sécurisées, souvent réalisées dans des conditions insalubres, augmentant les risques de complications graves, voire de décès.
Des chiffres alarmants des avortements clandestins
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Selon la Direction de la Santé de la Mère et de l’Enfant, plus de 30 000 avortements clandestins ont été recensés en 2020 au Sénégal. Ces avortements non médicalisés représentent la cinquième cause de décès maternels dans le pays. De plus, une étude menée par l’Association des Juristes Sénégalaises (AJS) estime que 51 500 avortements provoqués ont eu lieu en 2019, avec 17 600 femmes souffrant de complications graves telles que des hémorragies ou des infections.
Les inégalités d’accès à l’avortement sécurisé
Les femmes pauvres et rurales sont les plus vulnérables face à l’avortement clandestin. Elles ont moins accès aux services de santé, à l’information et aux moyens de contraception, ce qui les expose davantage aux risques liés à l’avortement non médicalisé. Les inégalités sociales et économiques exacerbent la situation, rendant l’accès à un avortement sécurisé encore plus difficile pour ces femmes.
Les appels à la légalisation de l’avortement médicalisé
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Des organisations de défense des droits des femmes, telles que la Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme (FIDH), militent pour la légalisation de l’avortement médicalisé en cas de viol, d’inceste ou de malformation fœtale. Elles soulignent que la criminalisation de l’avortement ne réduit pas sa pratique, mais expose plutôt les femmes à des dangers sanitaires et juridiques.
Les défis culturels et religieux
Au Sénégal, les normes culturelles et religieuses influencent fortement les attitudes envers l’avortement. Une majorité de la population soutient l’interdiction de l’avortement, en raison de croyances religieuses et de valeurs traditionnelles. Cette situation crée un environnement hostile au débat public sur la question, limitant les possibilités de réforme législative.
Vers une réforme législative ?
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Malgré les obstacles, des discussions sur la révision de la loi sur l’avortement ont eu lieu. En 2013, un groupe de travail réunissant des organisations féministes, des avocats, des médecins et des députés a été créé pour harmoniser le code pénal sénégalais avec l’article 14 du Protocole de Maputo, qui garantit le droit à l’avortement médicalisé. Cependant, près d’une décennie plus tard, aucune loi n’a été votée, et la situation reste inchangée.
La Journée mondiale du droit à l’avortement est l’occasion de rappeler l’urgence de la situation au Sénégal. La légalisation de l’avortement médicalisé est essentielle pour protéger la santé et les droits des femmes. Il est crucial que les autorités sénégalaises prennent des mesures concrètes pour garantir un accès sécurisé à l’avortement, conformément aux engagements internationaux du pays.