"Billets de salon" : la finesse d'un regard sur la société

Le journaliste Mame Gor Ngom, auteur du succulent recueil "Billets de salon" (Le Nègre International, juillet 2021, 120 pages), a peut-être, dans un coin de son esprit, une attente de la part de ceux et celles qui vont lire ses textes partis de deux salons, le sien propre et un autre plus célèbre.

Mame Gor Ngom, auteur de Billets de salon

.

Celui-là théâtre d’un de ces faits dont raffolent des chroniqueurs "people" : le constat est qu’il a essayé d’appliquer le mieux possible les règles d’écriture acquises à l’école, genre quelque peu négligé et pourtant très fort.

Il y a, avant tout, deux éléments d’analyse qui se dégagent de la lecture de "Billets de salon" : une application rigoureuse des règles d’écriture du billet, genre journalistique qui relève de la fiction, et la finesse d’un regard sur des faits d’actualité et de société qui interpellent leur auteur.

Dans ce que nous livre Ngom, il y a la substance du billet : des faits comme prétextes, de la désinvolture, de l’ironie dans des textes amusants, agréables à lire, parfois satiriques et livrés sans aucune forme d’agressivité.

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Dans un subtil jeu de l’esprit, il lance des clins d’œil au lecteur et, sur un ton particulier, offre une vraie bouffée d’air par sa manière de lire les faits d’actualité qu’il croque à sa manière, même s’ils sont graves. Mame Gor Ngom conduit son lecteur à travers un cheminement très rapide – rares sont les billets qui font plus de deux pages - au bout duquel il fera découvrir ce qui est présenté comme une vérité, une sagesse, une valeur idéologique.

Dans sa mise en situation des faits exposés et commentés, on lit des interrogations et réflexions qu’ils suscitent.

Le billettiste part de l’actualité (les accusations de viol qui pèsent sur l’homme politique Ousmane Sonko, les manifestations, commentaires, prises de position auxquels elles ont donné lieu…). Il s’appuie sur ses connaissances, sa culture générale (littéraire, scientifique, artistique, religieuse, sociologique…) pour donner à apprécier la finesse de son écriture.

Ngom n’oublie jamais que le contexte dans lequel il écrit est celui de la pandémie du Covid-19. Il se saisit de faits (la réapparition du virus Ebola, les mésaventures de l’artiste Karim Krum et du syndicaliste Dame Mbodj, le décès du chanteur Thione Seck, les réflexions de l’Union des magistrats du Sénégal sur l’Etat de Droit et l’indépendance de la justice…)

Un billet est fait pour frapper l’imagination du lecteur. Avec des chutes inattendues, l’auteur livre ce qui peut être considéré comme des sentences, des maximes ou des leçons de morale, qui sonnent plus comme des débats plus larges. Il renvoie très souvent dos-à-dos, a rarement des positions tranchées – certainement parce que les faits vont tellement vite.

Sans choquer, il amène à réfléchir (« Ces événements politico-judiciaires ne devraient pas nous faire oublier l’essentiel : nous voulons vivre et bien vivre » ; « On se préoccupe peu de la Covid-19 avec sa danse macabre qui se poursuit sur un rythme endiablé ; en attendant Ebola pour un mariage qui pourrait nous être fatal. » ; « En ces moments de grave crise, nous n’avons pas besoin de +Macky-le-guerrier+, comme semble l’annoncer le premier flic du pays. Nous avons besoin de paix. » ; « Souhaitons au juge Samba Sall un repos éternel. Quand le Juge Suprême décide, tout le monde accepte. Personne ne conteste. »)

"Vous allez le remarquer, sans doute, ces chroniques ne sont écrites ni pour dire la vérité ni pour taire la vérité encore moins pour la falsifier", écrit en toute humilité Mame Gor Ngom dans les dernières lignes de son avant-propos.

La seule prétention que l’on sent dans l’intention de l’auteur des "Billets de salon" est celle-ci : un journaliste digne de ce nom doit pouvoir, dans le brouhaha médiatique, social et politique, mettre en lumière la substance des faits, les analyser de façon honnête et ouvrir des pistes qui puissent servir au grand nombre.

En réussissant le pari de l’exercice, il honore le métier malmené par une pratique très peu catholique sous nos cieux.

Par Aboubacar Demba Cissokho

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