Avortement clandestin entre Dakar-Saly : le marchand ambulant était le cerveau
Le réseau opérait depuis plus d’une année dans l’ombre entre Dakar et la station balnéaire de Saly, pratiquant illégalement des interruptions volontaires de grossesse (IVG). Ce trafic, relate L'OBS, impliquait une déléguée médicale, S. Bousso Ndiaye, une jeune femme mariée et mère de famille âgée de 26 ans, et deux complices: F. Kane, un prétendu médecin, et O. Ndiaye, un marchand ambulant. Ils ont été arrêtés, ce 23 décembre 2025, à la suite d’une enquête menée par les gendarmes de la brigade de recherches de Saly Portudal.
Ce que révèle l'enquête
Selon les éléments de l’enquête présentés au tribunal de grande instance de Mbour, S. Bousso Ndiaye jouait un rôle central. Utilisant ses connaissances dans le domaine médical et pharmaceutique, elle parvenait à se procurer illégalement des produits abortifs. Elle servait d’intermédiaire entre le fournisseur, O. Ndiaye, basé au marché «Keur Serigne Bi» de Dakar, et l’exécutant, F. Kane, établie à Saly Niakh-Niakhal. L’organisation était méthodique et lucrative. O. Ndiaye vendait les boîtes de médicaments entre 12 000 et 15 000 FCFA. F. Kane les écoulait ensuite aux femmes qui le sollicitaient pour interrompre une grossesse à un prix exorbitant de 120 000 FCFA.
Une commission de 20 000 FCFA pour chaque opération
Pour chaque opération, S. Bousso Ndiaye percevait une commission oscillant entre 15 000 et 20 000 FCFA, selon ses propres déclarations à la barre. Après une information anonyme reçue par la gendarmerie, signalant un trafic de médicaments abortifs orchestré par F. Kane, les enquêteurs ont immédiatement mis en place un dispositif.
Comment le réseau a été démantelé
Une gendarme s’est fait passer pour une cliente potentielle et a contacté le suspect pour commander les produits. F. Kane, croyant à une transaction habituelle, a fixé le rendez-vous à son domicile et confirmé le prix de 120 000 FCFA. C’est lors de cette rencontre qu’elle a commis l’erreur fatale : elle a téléphoné à S. Bousso Ndiaye pour demander des précisions sur la posologie des médicaments, confirmant ainsi le lien entre les suspects et scellant leur sort. Immédiatement interpellé, F. Kane, pris de panique, a conduit les forces de l’ordre au domicile de la déléguée médicale.
La déléguée médicale arrêtée pendant qu'elle allaitait son bébé de 5 mois
Arrêtée à son domicile conjugal alors qu’elle allaitait son bébé de cinq mois, S. Bousso Ndiaye a, à son tour, révélé l’identité de son fournisseur dakarois. Les gendarmes se sont immédiatement rendus au marché «Keur Serigne Bi» où O. Ndiaye a été interpellé sans résistance. Face aux enquêteurs, les trois individus sont rapidement passés aux aveux, reconnaissant l’ensemble des faits qui leur étaient reprochés. Leurs déclarations, qualifiées de «terrifiantes» par la source judiciaire, ont détaillé le mode opératoire et l’ampleur du réseau, ainsi que les motivations purement financières qui les animaient.
Délibéré fixé au 6 janvier
Lors de leur comparution devant le tribunal de Mbour, les trois prévenus, en détention préventive depuis le 24 décembre ont décrit sans ambages leur organisation, de l’approvisionnement en médicaments à la réalisation des actes, en passant par la répartition des gains. Le procureur de la République, visiblement marqué par la gravité des faits et le caractère dangereux de ces pratiques clandestines pour la santé des femmes, a exprimé sa vive frustration. Dans son réquisitoire, il a demandé une peine exemplaire de deux ans d’emprisonnement ferme pour chacun des trois accusés, accompagnée d’une amende de 100 000 FCFA. La présidente du tribunal a annoncé que le délibéré était fixé au mardi 6 janvier 2026.