Depuis trois jours, les combats font rage dans la capitale soudanaise, Khartoum. Deux camps, l'armée et un groupe paramilitaire, se disputent la domination du pays. Une centaine de civils ont déjà été tués.
Au moins 56 civils sont morts dans les combats en cours au Soudan, notamment à Khartoum. Sept étudiants sénégalais piégés par le conflit racontent la guerre.
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Huit étudiants sénégalais retranchés dans l’université de Khartoum sont piégés par le conflit, rapporte L'OBSERVATEUR.
Mansour qui se prélassait encore au lit dans sa chambre du campus universitaire à Khartoum. En ce mois de jeûne du Ramadan et à cause des journées très chaudes, vit des nuits courtes qui l’obligent à se rattraper les journées de week-end. Mais ce samedi matin, le son des explosions et des tirs à l’arme lourde l’a brutalement tiré de son sommeil.
« On dormait encore lorsque les premiers coups ont éclaté. Depuis, nous en entendons toutes les deux minutes », commence-t-il avant d’être coupé par une autre rafale. Le son, très net au téléphone, semble provenir de la chambre de l’étudiant.
Pour cause, les combats entre militaires et paramilitaires sont très proches de l’université de Khartoum. Pour leur sécurité, les étudiants qui habitent le campus de l’université, ont décidé de s’auto-confiner.
Voilà donc deux jours que Mansour et deux autres amis sénégalais qui logent sur le campus, n’ont pas quitté leur chambre, de peur de se prendre une balle perdue. Selon le bilan dressé par les médecins soudanais, les affrontements ont causé la mort de dizaines de combattants et d’au moins 56 civils.
Étudiant en sciences islamiques au Soudan depuis 2015, Mansour a fini par s’habituer à la paix précaire qui règne dans ce pays d’Afrique du nord. Il a vécu en 2019, la vaste protestation populaire qui a mené à la destitution de l’ancien Président Omar El-Béchir. Il a aussi suivi de près les manifestations tragiques de 2021 qui ont fait 81 victimes. Mais jamais, l’étudiant sénégalais n’a encore vécu une situation où les balles sifflent quasi près de ses oreilles.
Le sentiment de peur qui l’habite constamment depuis le début des hostilités, l’empêche d’appeler ses parents au Sénégal pour les tenir informés. « De peur de leur transmettre mon stress», explique-t-il. D’autant plus qu’il reste persuadé de l’aggravation de la situation.
Les deux armées qui se battent pour le contrôle des bâtiments stratégiques semblent être dans une logique d’escalade et selon Mansour, l’Internet a été coupé ce dimanche.
Une mauvaise nouvelle pour la communauté étudiante sénégalaise qui avait formé un petit groupe sur WhatsApp pour garder le lien. « Nous sommes 7 étudiants sénégalais à l’université de Khartoum : trois à vivre au campus et le reste logé à la ville. L’Internet nous permet de ne jamais être coupés les uns des autres. Mais avec les perturbations, j’ai perdu le contact de deux camarades ».
Mansour n’arrive à joindre au téléphone ni l’un, ni l’autre. Le numéro du téléphone du premier ne marche plus et le second avait confié vouloir passer les dix dernières nuits du mois de Ramadan à la mosquée. Dès ce mardi, l’Armée devrait autoriser trois heures de répit par jour à la population pour permettre de s’approvisionner en denrées ou de prendre des nouvelles des proches.
A ce moment-là, Mansour pourrait peut-être essayer d’en savoir plus pour ses amis. Au pire, il contactera l’ambassade du Sénégal en Égypte chargé du Soudan. Pour l’heure, piégés dans ce conflit, Mansour et ses compatriotes semblent décidés à prendre leur mal en patience.