Gisèle P. prend la parole face aux 51 hommes qui l'ont violée

Droguée aux somnifères par son mari, Gisèle P. a été violée pendant dix ans par des dizaines d’inconnus à Mazan, la commune où le couple vivait. Son témoignage est attendu ce jeudi par la cour criminelle du Vaucluse à Avignon.

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92 viols en moins de 10 ans, commis par une cinquantaine d'hommes - peut-être jusqu'à 70 - sur une même victime, sans qu'elle le sache, parce que droguée, à son insu. Un scénario bien rodé mis en place par son propre mari. Voilà la teneur du procès qui s'est ouvert ce 2 septembre 2024 à Avignon, dans le sud de la France.

A chaque fois, elle était filmée par son mari qui l'avait au préalable droguée. 51 accusés, dont l'époux, sont jugés à Avignon. Le procès devrait durer plusieurs mois.

Les accusés - dont 18 en détention provisoire - sont des hommes, âgés de 21 à 68 ans au moment des faits. Le mari a 71 ans aujourd'hui. Ce procès hors norme, emblématique de la question de la soumission chimique, devrait se tenir jusqu'au 20 décembre devant la cour criminelle du Vaucluse.

Une cour exclusivement composée de magistrats professionnels. Pompier, artisan, infirmier, gardien de prison, ou encore journaliste ; célibataires, mariés ou divorcés : "Il n'y a pas de profil type du violeur. Le violeur, c'est Monsieur Tout-le-Monde", estime Véronique Le Goaziou, chercheuse associée au Laboratoire méditerranéen de sociologie, spécialiste des violences sexuelles.

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C'est un témoignage terrible qui est attendu ce jeudi par la cour criminelle du Vaucluse à Avignon. Violée pendant dix ans par des dizaines d’inconnus recrutés par son mari sur Internet, après avoir été droguée aux somnifères, Gisèle P., 72 ans, va prendre la parole pour la première fois, face aux 51 hommes qui ont abusé d’elle.

Depuis trois jours, la principale victime de ce procès était restée stoïque, silencieuse, s’exprimant seulement par l’intermédiaire de ses avocats, qui avaient notamment relayé lundi son refus d’un huis clos pour que « la honte change de camp ».

Même s’il y aura « des moments extrêmement difficiles », Gisèle P. « estime qu’elle n’a pas à se cacher », qu’elle « n’a pas à avoir honte », avait expliqué Me Stéphane Babonneau, l’un de ses deux avocats.

Silencieuse, elle était cependant très attentive aux débats entamés lundi et prévus pour durer quatre mois, jusqu’au 20 décembre. Et les questions au directeur d’enquête de certains avocats de la défense mercredi, demandant par exemple si le couple P. était un couple libertin ou s’il était crédible que Gisèle P. ne se soit rendu compte de rien, pendant dix ans, l’ont apparemment affectée.

Après ces accusations, ses trois enfants ont momentanément quitté la salle, ulcérés. Leur mère, elle, est restée, seule. Comme si elle ne souhaitait rater aucune seconde de ce procès dont elle attend des réponses.

Entourée de sa fille, Caroline Darian (son nom de plume pour le livre qu’elle a publié en 2022, Et j’ai cessé de t’appeler papa), et de ses deux fils, Florian et David, Gisèle P. va donc prendre la parole pour la première fois. Et donner sa version d’un dossier hors norme.

Interrogé mercredi, Jérémie Bosse Platière, directeur d’enquête sur cette affaire et désormais directeur interdépartemental de la police des Hautes-Alpes, a souligné « la détresse » de la victime quand celle-ci a appris les faits, à l’automne 2020, par les policiers. Cette détresse « a marqué » les enquêteurs, a insisté le commissaire divisionnaire.

Victime pendant dix ans des agissements de son mari, de juillet 2011 à octobre 2020, d’abord quand ils vivaient en région parisienne, puis surtout à leur domicile familial de Mazan, cette petite ville du Vaucluse où ils avaient déménagé en mars 2013, Gisèle P. n’avait jamais réalisé qu’elle avait été violée, pendant des années.

Par son époux, dont elle est en instance de divorce depuis la révélation des faits, et par de parfaits inconnus, âgés aujourd’hui de 26 à 74 ans. Pour elle, ce procès sera « une épreuve absolument terrible », avait prévenu Me Camus, également avocat des trois enfants du couple : elle « va vivre pour la première fois, en différé, les viols qu’elle a subis pendant dix ans. »

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