Celui qui avait pesé lourd de par sa verve, son verbe, sa stature et sa notoriété pour la chute d’Ibrahima Boubacar Keïta, avait jugé nécessaire de prendre du retrait pour aller occuper pleinement sa station d’imamat. Le voilà qui met dos-à-dos les dirigeants actuels au pouvoir et la communauté internationale. Les mots sont durs et bien choisis.
Au Mali, si l’imam Mahmoud Dicko qui s’était tu, reprend la parole, c’est un événement. S’il parle de la crise dans son pays et met les « pieds dans le plat », ses propos deviennent retentissants.
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« L’arrogance de nos dirigeants, leur arrogance et l’orgueil de la communauté internationale, c’est le peuple malien qui est en train de payer ça. C’est extrêmement grave », lance-t-il avant de dénoncer une « classe politique moribonde qui ne bouge pas, qui n’existe plus. Une société civile qui a cessé d’exister ». Un avertissement clair à tous les protagonistes qui préparent sans doute de nouvelles forces capables de prendre le contre-pied de ces postures fustigées.
S’achemine-t-on à nouveau vers des rassemblements populaires pour réclamer la chute des dirigeants comme c’était le cas avec Ibrahima Boubacar Keïta ? C’est loin d’être évident. Le pouvoir actuel, même s’il commet souvent des erreurs et se montre excessif par moments, garde encore intacte une certaine popularité. En secouant la fibre nationaliste face à des sanctions disproportionnées de la communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), la junte a su capitaliser des dividendes qui lui ont permis de résister et d’asseoir un pouvoir plusieurs fois secoué mais qui tient toujours contre vents et marées.
Le coup de gueule si audible de l’Imam Dicko peut être donc interprété comme un appel à l’inclusion devant cette tendance du Colonel Assimi Goïta et ses camarades à vouloir être « maîtres de leur univers ». La raison voudrait qu’ils se rapprochent de l’Imam, qu’ils trouvent des compromis pour ne pas réveiller inutilement un autre mouvement contestataire, un « peuple trimbalé entre des gens qui veulent une transition indéfinie ». Ce serait difficilement contrôlable et ferait l’affaire de la France et d’une certaine communauté internationale qui perd la main au Mali…