Il se voit alors planer au-dessus du commun des mortels, comme touché par une Grâce dont il serait le seul à sonder la profondeur du secret. Ses propres qualités, méconnues jusqu’ici, il faut qu’il les étale au grand jour afin que nul n’en ignore. À défaut d’entendre parler de lui, il en parlera …lui-même ! Au besoin il glissera des enveloppes garnies à des relais médiatiques compatissants, pour distiller, au cœur de la foule des ignorants de son état, la parole. La bonne parole. Que dis-je ? Sa propre parole. Celle qui le désigne comme le porteur d’un destin inéluctable. Un destin sans dessein connu jusqu’ici. Un destin sans vision, autre que le culte à sa propre vanité. Un culte dont il est le seul adepte. Mis à part quelques laudateurs indécrottables…
« Au pays des aveugles, les borgnes sont rois », disait une maxime populaire ! Eh ! bien les borgnes règnent désormais au Sénégal. Sans partage. Et ils veulent tous devenir Présidents !
Qu’avons-nous donc fait au Bon Dieu pour mériter le sort qui nous est fait de devoir, chaque jour qui se lève, subir les jactances de quidams dont l’outrecuidance n’a d’égal que notre lassitude…coupable ? « Plus on est de fous, plus on rit », disait encore la sagesse populaire… Au fond, l’épidémie présidentielle Covid 24 qui sévit de plus en plus illustre bien le fossé dans lequel nous nous sommes laissé entraîner. Lentement, mais sûrement ! Depuis plusieurs années. Il va falloir désormais, poser un diagnostic sérieux sur ce qui arrive à ce pays, si riche en ressources humaines de qualité et, de mieux en mieux servi en ressources naturelles. Pour ne pas que l’épidémie Covid 24 extermine le bon sens et l’humilité sans lesquels la contagion risque d’être fatale aux élites de notre pays. Pour ce qui en reste.
Quelques questions auxquelles nous devons trouver réponses :
- Pourquoi nous ne parvenons pas à organiser, collectivement, nos efforts et nos intelligences pour améliorer nos conditions de vie et d’existence ? Notamment au bénéfice des plus démunis.
- Pourquoi nos élites, politiques et intellectuelles, restent enfermées dans des logiques de compétitions interpersonnelles, d’enrichissement et de jouissance des avantages de la puissance publique ?
- Pourquoi nous ne développons pas une conscience historique qui éclaire les erreurs du passé et nous rende aptes à ne pas les reproduire ?
- Pourquoi nous restons fascinés par le modèle de développement de l’occident ?
- Pourquoi nous n’inventons pas des modèles fondés sur nos meilleures valeurs culturelles enracinées dans notre identité africaine ?
Chacune de ces questions en pose d’autres ! Des milliers d’autres dont les réponses feront le lit d’une transformation radicale de nos paradigmes sociaux et politiques. La paresse intellectuelle des élites contribue à tirer vers le bas la quête de sens sans laquelle nous resterons « les perroquets » dont Feu Amady Aly DIENG qualifiait les « intellectuels africains qui passent leur temps à réciter des leçons bien apprises. » Sans se donner les moyens de créer du neuf. Sans avoir le courage d’ouvrir des perspectives neuves. À de rares exceptions près et on a vu quels malheurs se sont abattus sur ces rares étoiles. Suivez mon regard !
Il est temps de se vacciner ! Il est temps, surtout, de sauver les candidatures sérieuses de la contamination des candidats malades. Afin que le débat pour les prochaines élections présidentielles soit élevé. Riche et pragmatique. Les défis qui nous attendent sont d’une urgence telle que nous ne pouvons plus nous permettre de perdre du temps en joutes oratoires approximatives.
Identifier les problèmes et proposer des solutions efficaces, faisables et réalistes c’est tout ce que l’on attend des candidats à la prochaine élection présidentielle !
Si certains ne se sont construits que dans l’adversité contre le Président sortant, il faut aujourd’hui qu’ils fassent montre d’imagination, de connaissances et de pertinence dans leurs propositions pour changer le Sénégal en mieux. Le discours vindicatif devrait céder le pas au discours constructif à partir d’un état des lieux rigoureux.
Et d’abord, respecter et faire respecter, le moment venu la « Loi 2012-22 portant Code de Transparence dans la gestion des finances publiques » dans toute sa rigueur ! Cette loi dispose en son alinéa 1.7 :
« Dans les trois mois suivants, chaque nouveau mandat présidentiel, la situation globale des finances publiques, et en particulier la situation du budget de l’État et de son endettement, fait l’objet d’un rapport préparé par le Gouvernement.
Ce rapport, audité par la Cour des Comptes, est publié dans les trois mois suivants. »
Cette loi avait-elle été respectée après l’élection présidentielle de 2019 ? Juste une question !
Restons concentrés sur l’essentiel !
Amadou Tidiane WONE
Ancien ministre de la Culture du Sénégal, ancien ambassadeur, écrivain et panafricaniste.
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