De Nantes à Hong Kong en passant par la banlieue sud de Paris et le Sénégal, voilà le trafic de civelles d'ampleur et de dimension internationale qui a été démantelé par l'Office national anti-fraude et par l'Office français de la biodiversité. Après plus de deux ans d'enquête, 13 personnes sont jugées, ce jeudi 3 et ce vendredi 4 avril, devant le tribunal de Créteil. Parmi elles, deux Nantais sont soupçonnés d'avoir pêché les alevins d'anguilles qui alimentaient le réseau.
303 kilos, soit environ 818.000 alevins d'anguilles saisis
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Tout commence en février 2023 par la surveillance d'une camionnette qui part de la région nantaise, direction la banlieue sud de Paris. Là où elle est déchargée, à Villeneuve-Saint-Georges, les enquêteurs découvrent cinq piscines oxygénées dans un entrepôt clandestin. Trois personnes, des ressortissants chinois, sont interpellées. 303 kilos de civelles sont saisis, ce qui représente approximativement 818.000 alevins, pour une valeur comprise entre 1,7 et 2,1 millions d'euros !
Nouvelle route de transfert via l'Afrique
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La poursuite des investigations permet de mettre au jour un réseau criminel organisé et une nouvelle route de transfert depuis la France vers l'Asie via l'Afrique, en particulier le Sénégal. Les civelles partaient pour Dakar, la capitale du Sénégal, par avion depuis Roissy, cachées dans les valises de voyageurs malaisiens qui servaient de "mules", comme pour le trafic de drogue. Trois d'entre eux ont été interpellés à Roissy en février 2024 avec 55 kilos de civelles répartis dans neuf valises.
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Le nom des poissons modifié pour permettre leur export
Au Sénégal, c'est un entrepôt avec une vingtaine de piscines destinées à l'élevage des alevins d'anguilles qui est découvert. C'est cette étape sénégalaise qui permettait aux trafiquants chinois de changer le nom de l'espèce et d'exporter facilement les petits poissons. Les anguilles qu'on pêche chez nous, les "Anguilla Anguilla", dont l'exportation hors Union européenne est interdite, devenaient des "Anguilla Mossambica", qu'on trouve dans les eaux africaines et qui ne sont pas protégées comme leurs cousines européennes. C'est ce qui permettait d'envoyer une tonne d'alevins, chaque mois, par avion, vers Hong Kong.