Le Sénégal dégringole en matière de liberté de la presse. Hier, à l’occasion du lancement de son nouveau rapport intitulé «Sénégal : Le journalisme à la croisée des chemins», Reporters sans frontières (Rsf) révèle qu’en trois ans, de 2021 à 2024, plus de 60 journalistes ont été arrêtés, agressés, interpellés ou détenus.
En trois ans, le Sénégal a reculé de la 49e à la 94e place au classement mondial de la liberté de la presse de RSF, révèle Reporters sans frontières (Rsf).
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Pire encore, estime l’Ong, la polarisation, les ingérences politiques et la désinformation se sont accentuées. Alors, face à ce tableau «inquiétant», souligne Rsf, l’arrivée au pouvoir de nouvelles autorités au Sénégal est une opportunité pour que le visage «balafré» des médias cicatrise, et que le pays redevienne moteur dans la défense du droit à l’information dans l’ensemble de la région et en Afrique.
Selon Sadibou Marong, directeur du Bureau Afrique subsaharienne de Rsf, le Sénégal a été une locomotive de la liberté de la presse en Afrique, mais dans le monitoring fait par Rsf, entre 2021 et 2024, le Sénégal a enregistré environ 70 entraves au travail des journalistes. Dans le détail, il s’agit d’interpellations, d’arrestations, de vagues de cyber-harcèlement et de violences policières.
« Entre 2021 et 2024, il y a effectivement une succession de violences que nous appelons des atteintes. Au moins 70 entraves au travail des journalistes en termes d’interpellation de journalistes et d’arrestation, une bonne quinzaine, des violences policières contre des journalistes dans l’exercice de leur fonction pour environ une bonne trentaine et également la question des troubles socio-politiques qui avaient impacté un peu la sécurité des journalistes », explique Sadibou Marong, rappelant que le Sénégal, qui occupait la 49e place au Classement mondial de la liberté de la presse de Rsf en 2021, a dégringolé à la 94e position en 2024.
Ce recul drastique de 35 places, entre 2021 et 2024, illustre l’ampleur des entraves au droit à l’information. «Après trois années de chute libre, il est grand temps que le Sénégal reparte de l’avant en matière de liberté de la presse», déclare Sadibou Marong.
34 attaques perpétrées par les FDS
Le rapport de Rsf fait état de 34 attaques perpétrées par les Forces de sécurité, visant principalement les journalistes couvrant les manifestations sociopolitiques. Pour l’Ong, la confiscation de matériel professionnel et les agressions physiques sont devenues monnaie courante. De plus, estime M. Marong, les autorités précédentes n’ont pas hésité à couper l’accès à Internet à quatre reprises en l’espace de neuf mois, créant ainsi un dangereux précédent.
Rsf, dans son rapport, étale également les arrestations et interpellations de journalistes critiques du pouvoir d’alors, mais aussi le cyber-harcèlement qui, selon eux, constitue une autre menace «sérieuse», avec des campagnes souvent orchestrées par des militants politiques, laissant les journalistes sans protection efficace. Autre illustration inquiétante de l’impunité et des types d’attaques contre les journalistes que révèle Rsf, c’est le mode opératoire baptisé «72h Pastef». Une stratégie coordonnée de harcèlement sur les réseaux sociaux de personnes qu’ils identifient comme critiques des agissements de l’ancien parti d’opposition.
Outre les attaques perpétrées par les Forces de sécurité, le rapport souligne également les ingérences politiques et la propagation de la désinformation.