Kafountine : la première adjointe au maire trafiquait des cartes nationales d’identité
Une rocambolesque affaire de faux et d’usage de faux impliquant la première adjointe au maire de Kafountine et portant sur des documents administratifs a été mise à nue par les limiers de la Dnlt à Ziguinchor. Tout est parti d’un contrôle de routine effectué au poste de contrôle de Kidira. Le nommé M. Sawadogo, un Burkinabé, a été contrôlé et trouvé en possession de deux (02) pièces d'identité distinctes, l'une Burkinabè et l'autre sénégalaise, suspectées avoir été obtenues frauduleusement.
Selon les infos de L'OBS, les vérifications effectuées ont révélé une incompatibilité des données d'identification, à l'exception de la photographie. Soumis à un interrogatoire serré, M. Sawadogo déclare que la pièce étrangère était authentique, tandis que celle sénégalaise était fausse. Une convocation lui a été remise avec ordre de se présenter à l'Antenne Régionale de la direction nationale de lutte contre le trafic de migrants et pratiques assimilées (Dnlt) de Ziguinchor pour les besoins de l'enquête.
A la Dnlt, M. Sadio est interrogé sur les circonstances de l’acquisition desdits documents. L’intéressé a réitéré ses propos tenus au poste des frontières de Kidira. Selon lui, la pièce Burkinabè est authentique tandis que celle sénégalaise a été obtenue après de fausses démarches administratives dans le but de faciliter ses activités professionnelles au Sénégal.
Il a déclaré avoir adopté une fausse identité sénégalaise en empruntant un nom à consonance locale et en se faisant attribuer de faux parents adoptifs pour constituer un dossier d’état civil complet. Il a aussi précisé que la pièce sénégalaise lui était nécessaire pour contourner les taxes locales dans le cadre de son activité professionnelle. L'enquête menée par les éléments de la police de la Dnlt de Ziguinchor a révélé que l'extrait de naissance n°338 de 1983 qui a permis au Burkinabé de se procurer une pièce d’identité biométrique sous le nom de M. Sadio avait été frauduleusement inséré par M. Sagna, responsable du centre de l’état civil et signé par la première adjointe au maire, D. Sambou, sans vérification.
Cette découverte met en lumière un réseau structuré et organisé au sein de la mairie de Kafountine, impliquant la première adjointe au maire D. Sambou, le responsable du centre de l’état civil M. Sagna et l’officier d’état civil S. Diabang, l’agent municipal, A. Preira, P. Sagna également agent municipal et A. Diatta. Ces derniers créaient et validaient des actes d'état civil fictifs pour des étrangers, en échange d'argent. «Les registres exploités vont de 1977 à 2005, avec des inscriptions illégales, surcharges et documents fictifs», renseignent nos sources. Eu égard à ces irrégularités graves, huit registres ont été placés sous scellés provisoires.
Il s'agit des registres des années 1977, 1983, 1989, 1990, deux (02) registres de 2005, un de 2014 et un de 2016», ajoutent nos sources. Interrogés sommairement, les accusés ont unanimement reconnu, de manière partielle, les faits qui leur sont reprochés, tout en tentant de se renvoyer mutuellement la responsabilité. À ce stade de la procédure, chacun a exposé sa version des faits, permettant ainsi d'apprécier le degré réel d'implication de chaque personne dans l'affaire.
La première adjointe au maire, D. Sambou a reconnu avoir signé l'extrait de naissance fictif. Interpellée sur sa responsabilité, elle a admis ne pas avoir procédé aux vérifications préalables, affirmant qu'il s'agissait d'une pratique courante à la mairie. Par ailleurs, les agents municipaux M. Sagna, S. Diabang, A. Preira, P. Sagna et A. Diatta ont reconnu leur collaboration dans l'établissement d'actes frauduleux, désignant M. Sagna, responsable du centre d'état civil, comme principal exécutant. «Ils ont déclaré avoir agi en contrepartie d'avantages financiers, sans pouvoir en préciser le montant exact, invoquant la faiblesse de leurs salaires.
S'agissant du mode opératoire, les mis en cause obtenaient les informations d'identité des ressortissants soit par messages, soit sur des bouts de papier, lesquelles étaient ensuite copiées manuellement dans les registres d'état civil afin d'établir des actes frauduleux. A l’issue de l’enquête, les nommés M. Sawadogo, M. Sagna, S. Diabang, A. Preira, P. Sagna et A. Diatta ont été conduits, hier, déférés devant le Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Ziguinchor.