Droits humains : la très mauvaise note d'Amnesty au Sénégal

Dans son rapport 20226-2023, Amnesty international n'a pas été tendre avec le Sénégal en matière de respect des droits de l’Homme.

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L’Ong Amnesty international a rendu public son rapport 2022-2023 sur la situation des Droits humains dans 156 pays dont le Sénégal. Le rapport a dénoncé la «répression de l’opposition politique» exercée par les pouvoirs publics.

«Le 16 mars, Ousmane Sonko, chef du parti d’opposition Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), a comparu devant un tribunal de Dakar pour diffamation à la suite d’une plainte au civil déposée contre lui par le ministre du Tourisme, Mame Mbaye Niang. Pendant son trajet depuis son domicile, la police a fait usage de gaz lacrymogène. Et après une querelle au sujet de son itinéraire, Ousmane Sonko a été extrait de force de son véhicule puis conduit par des policiers jusqu’au tribunal. Au début de l’audience, des affrontements ont éclaté à Dakar entre la police et des manifestants qui exprimaient leur soutien à Ousmane Sonko(…)», lit-on dans le rapport.

Lequel précise de nouveau : « (…) Après l’ajournement du procès, l’opposition a été empêchée d’organiser une conférence de presse par des policiers qui ont restreint l’accès au siège du Parti républicain pour le progrès (Prp), où elle devait se dérouler. »

« En fin de journée, au moins une personne est morte après avoir été renversée par un véhicule conduit par des individus armés, dans la commune des Parcelles Assainies. Dans la soirée, Ousmane Sonko a été hospitalisé dans une clinique privée car il souffrait de vertiges, de maux de tête et de douleurs au bas-ventre. S’il était condamné, Ousmane Sonko pourrait devenir inéligible pour les élections de 2024 », signale le rapport.

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Dénonçant toujours la répression que l’Etat du Sénégal exerce sur «les voix dissidentes», le rapport est revenu sur les déboires judiciaires de l’ancien Premier ministre, Hadjibou Soumaré.

« Le 9 mars, l’ancien Premier ministre Hadjibou Soumaré a été arrêté pour ‘’diffamation’’ après avoir demandé au Président Macky Sall, dans une lettre ouverte, s’il avait fait un don de 12 millions d’euros (plus de 7 milliards FCfa) à une personnalité politique française (Marine Le Pen) dont le parti est connu pour utiliser la haine et le rejet de l’autre (…). Deux jours avant son arrestation, le gouvernement avait démenti ces allégations en les qualifiant de ‘’lâches et infondées’’. Hadjibou Soumaré a été remis en liberté le 13 mars et placé sous contrôle judiciaire », ont écrit les auteurs du rapport, qui condamnent de nouveau le pouvoir en place.

Le militant Mohamed Samba Djim, membre du Front pour une révolution anti-impérialiste populaire et panafricaine (Frapp), a été arrêté à son domicile, à Dakar, le 6 février. Accusé d’avoir financé des activités susceptibles de porter atteinte à la sécurité publique ou de provoquer des troubles politiques, il a été placé en détention provisoire.

Avant son arrestation, il avait participé à plusieurs campagnes de financement participatif en ligne pour soutenir des membres de Pastef et des fonctionnaires exclus de l’administration actuelle. Le 7 décembre, Fadilou Keita, membre du cabinet d’Ousmane Sonko, a été arrêté et accusé d’avoir ‘’diffusé de fausses informations et insulté les institutions de l’État’’.

Son arrestation a fait suite à une publication sur Facebook dans laquelle il avait déclaré soupçonner un acte criminel dans l’affaire de la disparition forcée de l’Adjudant-chef Didier Badji et du Sergent Fulbert Sambou, un officier du renseignement militaire, en novembre.

Le corps de Fulbert Sambou a été retrouvé en mer le 23 novembre 2022. Fadilou Keita est toujours détenu et a entamé une grève de la faim le 16 mars. Le jour des manifestations à Mbacké, la chaîne de télévision privée Walf TV a été interdite d’antenne pendant sept jours par le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (Cnra), qui l’accuse d’avoir assuré une couverture ‘’irresponsable’’ des manifestations violentes».

Recours excessif à la force, tortures, interdictions systématiques de réunions et restrictions des libertés d’expression

L’interdiction systématique des réunions n’enchante pas également Amnesty international. Dans son rapport, la structure dirigée par Seydi Gassama au Sénégal s’est offusquée du comportement des tenants du pouvoir.

« En juin, les autorités sénégalaises ont interdit plusieurs manifestations de l’opposition sur fond de tensions préélectorales. Le 17 juin, les forces de sécurité ont arrêté au moins trois dirigeants de l’opposition et en ont empêché d’autres de quitter leur domicile, afin d’éviter une manifestation interdite prévue ce jour-là à Dakar. Déthié Fall, représentant national de la liste d’opposition aux législatives, s’est vu infliger une peine de six mois de prison avec sursis pour participation à une manifestation non autorisée. Ahmed Aidara, maire de Guédiawaye, a été condamné à un mois de prison avec sursis pour participation à un attroupement non armé », dénonce le rapport.

Qui signale par ailleurs que la liberté d’expression n’est pas garantie au Sénégal. Le 10 juin, le dirigeant de l’opposition Cheikh Abdou Mbacké Bara Dolly a été arrêté et inculpé d'offense au chef de l’État, de diffusion de fausses nouvelles et de diffamation, après un discours qu’il avait prononcé lors d’une manifestation de l’opposition. Il a été libéré à titre provisoire en juillet.

Le 3 août, Pape Ibra Guèye, un militant surnommé ‘’Papito Kara’’, a été arrêté et incarcéré pour le délit de diffusion de fausses nouvelles et celui d’effacement, de modification, de falsification et d’introduction de données informatiques pour avoir détourné des unes de journaux. Cinq jours plus tard, un autre militant, Outhmane Diagne, a été placé en détention pour les mêmes motifs.

Ces deux hommes étaient poursuivis pour avoir créé de fausses unes satiriques de quotidiens. Pape Alé Niang a été arrêté le 6 novembre par la police, trois jours après avoir diffusé en direct sur Facebook une vidéo dans laquelle il commentait l’audience judiciaire du dirigeant de l’opposition Ousmane Sonko et rendait public un rapport d’enquête interne de la gendarmerie.

Il a été inculpé de recel et publication de documents militaires sans autorisation de la hiérarchie de nature à nuire à la défense nationale, d’appel à la subversion et de diffusion de fausses nouvelles susceptibles de discréditer les institutions publiques, lit-on encore dans le volumineux rapport.

Le recours excessif à la force, les tortures et autres mauvais traitements, ainsi que les graves accidents survenus en raison du mauvais entretien de certains établissements de santé, ont été également reprochés à l’Etat du Sénégal.

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