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Une expertise médicale en jeu
Depuis sa cellule de la prison centrale de Rebeuss, Farba Ngom joue peut-être sa dernière carte. Accusé d’escroquerie, de détournement de deniers publics, de complicité, de blanchiment et d’association de malfaiteurs dans une affaire tentaculaire impliquant quelque 91 milliards FCfa, le député-maire des Agnam attend désormais le verdict… médical.
Le juge d’instruction Idrissa Diarra, en charge de l’enquête, a sollicité une expertise indépendante pour déterminer si son état de santé est compatible avec le régime carcéral. C’est le professeur Alassane Mbaye, cardiologue réputé de l’hôpital Idrissa Pouye de Grand-Yoff, qui a été désigné par l’Ordre des médecins pour cette mission délicate. Son rapport pourrait bouleverser la suite de la procédure judiciaire. Farba Ngom n’a jamais cessé de clamer que ses pathologies le rendent inapte à la détention. Dès son incarcération, il s’était présenté à Rebeuss avec un dossier médical sous le bras, espérant un transfert au Pavillon spécial de l’hôpital Aristide Le Dantec, réservé aux détenus souffrants.
Mais les médecins de ce service n’avaient pas jugé nécessaire de l’y admettre. Il est donc resté dans l’univers rude de la prison centrale, malgré ses plaintes persistantes.Depuis, ses avocats multiplient les requêtes pour obtenir une liberté provisoire, toutes rejetées jusqu’ici. La dernière tentative en date s’appuie sur une offre de caution de 44,8 milliards de francs Cfa, constituée de 22 titres fonciers estimés à 43,802 milliards (à Dakar, Thiès, Mbour, Rufisque ou encore Enga) et d’un dépôt d’un milliard FCfa en espèces. Les biens immobiliers, proposés en garantie, pourraient être hypothéqués au nom de l’État. L’examen médico-légal ordonné par le juge représente désormais une étape décisive.
Le professeur Alassane Mbaye devra déterminer, à la lumière de son expertise en cardiologie, si le détenu peut ou non rester à Rebeuss sans danger pour sa santé. Ce rapport pourrait, soit ouvrir la voie à une libération conditionnelle, soit refermer définitivement la porte de la prison sur l’ex-homme fort de l’APR dans le Fouta. Au-delà de la médecine, c’est donc un enjeu judiciaire et politique qui se noue autour de cette expertise. Car Farba Ngom, longtemps considéré comme un proche du président Macky Sall, n’est pas un détenu ordinaire.
Il est poursuivi dans deux dossiers distincts, le premier, dans lequel il est suspecté d’avoir facilité le détournement de 91 milliards de francs Cfa au profit de l’homme d’affaires Tahirou Sarr, le second, où il est lui-même accusé d’avoir orchestré un détournement de 31 milliards.Dans l’attente du rapport médical, la justice marche sur un fil. Entre impératifs de santé, pression politique et exigence de transparence, l’affaire Farba Ngom continue d’ébranler les murs de Rebeuss… et ceux de la République.