Une opération policière d’envergure menée mardi dans le Complexo da Penha, l’une des favelas les plus denses de Rio de Janeiro, a tourné au bain de sang. Selon un bilan officiel communiqué par les autorités brésiliennes, au moins 119 personnes ont été tuées, parmi lesquelles 115 présumés membres de gangs et quatre policiers. Mais les services du Défenseur public de Rio, organe d’assistance juridique de l’État, évoquent un bilan encore plus lourd 132 morts.
Une opération d’une violence inédite
Cette vaste offensive visait le Comando Vermelho, le principal groupe criminel opérant dans les favelas de Rio. Plus de 2 500 agents policiers, militaires et forces spéciales ont été déployés, soutenus par des blindés et des hélicoptères. Des échanges de tirs nourris ont éclaté pendant plusieurs heures. Au lendemain des affrontements, les images venues du Complexo da Penha sont insoutenables : des dizaines de corps alignés dans les ruelles, des habitants en pleurs, et des familles cherchant leurs proches. Des témoins et défenseurs des droits humains accusent la police de violences extrajudiciaires. « Beaucoup d’entre eux ont été tués d’une balle dans la nuque ou dans le dos », témoigne Raull Santiago, un activiste local. « Certains se sont rendus, mais ont été exécutés de sang-froid », dénonce l’avocat Albino Pereira Neto, représentant plusieurs familles de victimes.
Indignation nationale et internationale
Face au bilan humain sans précédent, les réactions se multiplient. Le président Luiz Inácio Lula da Silva s’est dit « sidéré » par l’ampleur du drame. Son ministre de la Justice a demandé des explications au gouverneur de Rio, Cláudio Castro, qui a admis que le nombre de victimes pourrait encore augmenter à mesure que les corps sont recensés. De son côté, l’Organisation des Nations Unies (ONU) s’est déclarée profondément préoccupée, appelant les autorités à ouvrir une enquête indépendante et transparente. Les ONG locales rappellent que les favelas brésiliennes sont régulièrement le théâtre d’opérations policières sanglantes, menées au nom de la lutte antidrogue, mais souvent marquées par des abus graves et une impunité persistante.
Une favela meurtrie
Les habitants du Complexo da Penha restent traumatisés. « Ce n’est plus une opération policière, c’est une guerre contre les pauvres », lâche une mère de famille interrogée par la presse locale. Pendant que le Brésil s’interroge sur la légitimité de telles interventions, le deuil et la peur planent toujours sur les hauteurs de Rio.