Sénégal : Ce qui a changé notre Président [Opinion du Contributeur]

L'image est très peu ordinaire. 23 juin 2023. Nous ne sommes pas devant l’Assemblée nationale du Sénégal un certain 23 juin 2011 quand Abdoulaye Wade voulait faire passer un projet de loi funeste qui devrait permettre facilement sa réélection en 2012.

Le Président Macky SALL lors de la remise du rapport de conclusion du dialogue national, le 25 juin 2023

Avec un « quart bloquant » qui allait passer comme lettre à la Poste si les Sénégalais ne s’étaient pas massés devant les grilles du Parlement pour protester. L’actualité ce sont ces Sénégalais au siège de la Cour Pénale Internationale (Cpi) à la Haye, pour dénoncer ce qu'ils qualifient de « crimes contre l'humanité ». Les événements de février-mars 2021 et ceux du début du mois de juin ont été les sujets principaux. Des mises en scène, des chants et des cris de guerre devant l'instance supra-nationale. Objectif : pour que justice soit faite. Une telle trouvaille était inimaginable. Car, il y a plus de 11 ans quand Macky Sall accédait au pouvoir, l’espoir d’une rupture définitive d’avec les pratiques désuètes avait été bien entretenu.

Ses premiers mots ont été apaisants. Il promettait avec détermination de nettoyer les écuries d'Augias, de faire revenir la confiance envers les institutions, de mettre la patrie avant le parti. Il était aussi beaucoup question de la « gouvernance sobre et vertueuse ». Un slogan clamé partout. Il est d’une beauté remarquable. Hélas, une expression malheureuse est venue tout remettre en cause : réduire l’opposition à sa plus simple expression. C’est là d’où sont venus tous les malheurs du moment, toutes les incompréhensions, toutes ces turpitudes.

Depuis lors, Macky Sall a quitté son chemin de salut pour s’engouffrer dans une route de tous les risques. En dépit d’un bilan matériel respectable et défendable, sa côte de popularité s’amenuise de plus en plus du fait de postures qui découlent de cette assertion. Depuis lors, la transhumance tant combattue sous Wade, est devenue beaucoup plus en vogue. Elle bat son plein. On fait son apologie. Beaucoup de pontes du régime Wade ont vite rejoint « les prairies marron ». La traque aux biens mal acquis s’est décélérée. La Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) est morte de sa belle mort.

À part Karim Wade, tête de gondole de cette « opération de salubrité », et quelques lampions, la Crei n’a vraiment pas été à la hauteur des attentes. Depuis lors, la justice donne l’impression de ne pas être juste. Depuis lors, la démocratie a beaucoup souffert. Depuis lors, il y a eu des excès et des arrestations. Les libertés sont bafouées, la liberté de la presse en a pâti. Reporters Sans Frontières (Rsf) nous donne une note passable voire médiocre. Ici, la liberté de presse recule. De la 73ᵉ à la 104ᵉ place : c’est l’une des baisses les plus importantes du dernier classement de Rsf.

Les dernières manifestations et leurs lots de malheurs n’ont été qu’une logique des écarts constatés. Beaucoup de dégâts. Le tonitruant avocat Juan Branco affirme avoir « plus de 4 500 éléments de preuve ». « 710 éléments de preuve des exactions » du pouvoir sénégalais, pour servir de support à la demande d’enquête à la CPI, précise-t-il. Les dégâts collatéraux sont si dévastateurs comme cette folie qui a poussé certains à mettre le feu à l’université. Le Cesti, l’école de journalisme de Dakar vandalisée, la Bibliothèque Universitaire touchée. C’est cruel ! A condamner avec énergie.

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L’épine Branco

Branco est une véritable épine au pied du régime. Depuis qu'il a été brutalement empêché de fouler le sol sénégalais pour les besoins du procès Sonko-Mame Mbaye Niang, le voilà qui multiplie ses sorties contre le pouvoir. En véritable activiste, cet avocat français n'a cessé d'étaler sur les réseaux sociaux tout le bien qu'il pense de la gestion de Sall. Une aubaine pour Ousmane Sonko qui voit de jour en jour son combat s'internationaliser. Branco est bien dans son élément. Habitué des « dossiers chauds » et des affaires spectaculaires, il est très à l’aise avec son « cas » du moment. Pas un jour, sans qu’il ne « tire » sur ses cibles qui sont des pontes du régime ou certains qui sont à la périphérie du pouvoir dont le rôle supposé lors des dernières manifestations meurtrières est mis en exergue.

La conférence de presse à Paris de l’avocat français de l’opposant numéro 1 de Macky Sall, a été un véritable one-man-show. Il est dans son terrain de prédilection qui englobe tout ce qu’il a qualifié d’injustice. Les précisions de beaucoup de ses informations en amont et en aval des terribles événements de début 2023, montre qu’il peut faire mal à un régime qui se braque. Le timing est bien choisi. Une pression supplémentaire pour le président de la République dont la candidature « se précise ». Une manière de montrer que les nombreuses remontrances, les manifestations jusque devant sa résidence parisienne, les alertes, le laissent de marbre.

En apparence. Branco fait mal avec des révélations quasi-quotidiennes qui pourraient pousser les autorités à commettre d’autres erreurs. Le pouvoir réagit plus qu’il n’agit.

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