18 Safar, la réussite au bout des épreuves

Le Grand Magal de Touba dans quelques jours. Il s'agit de la célébration du départ en exil de Cheikh Ahmadou Bamba. D'habitude, c'est le retour, la fin des difficultés, des sévices et des drames qui font l'objet d'une fête, pour marquer un certain soulagement. Pour remercier le Seigneur et ceux-là qui ont œuvré pour une issue favorable.

Des fidèles se réunissent dans la grande mosquée de Touba pour la prière du vendredi

C’est tout le contraire de Serigne Touba pour qui les épreuves ont été avant tout un moyen pour qu'il aille aux cimes de la spiritualité. Que sans ces difficultés, ces manigances, ces sournoiseries, ces petites querelles, la mission ne serait pas si réussie. Que de brimades pour qu’il perde la sérénité et son stoïcisme légendaire. « C’est ce jour-là qu’ils le jetèrent dans l’océan. Et ils lui dirent : tu vas bientôt disparaître à cause de ta turbulence », raconte Serigne Moussa Ka. « Ils m’ont jeté dans la mer par refus de la volonté divine et par haine. Mais le Généreux m’y a incontestablement comblé de sa grâce ». « Ils ont voulu m’humilier en me jetant dans la mer, heureusement que le Seigneur a dompté pour moi la plus houleuse des mers », écrit Cheikh Ahmadou Bamba. Sa stratégie était la meilleure. Pour lui, ceux-là qui pensaient l’anéantir avec un cynisme incroyable, n’agissait que sous la dictée divine. Celui-là qui voulait mesurer son niveau de résistance et de croyance.

« Je cheminais en vérité, lors de ma marche vers l'Exil, en compagnie des Vertueux Gens de Badr alors que mes persécuteurs étaient persuadés que j'étais leur prisonnier », écrit Cheikh Ahmadou Bamba. Il quitta sa famille, ses disciples et son pays à bord du navire "Ville de Pernambouc" pour un exil qui allait durer 7 longues années. Il vécut les moments les plus durs de son existence dans l'île de Mayombé où il subit toutes sortes de persécutions et de souffrances. Serigne Touba avec un stoïcisme remarquable a su transcender toutes les peines. C’est ainsi qu'il s'est adressé à la mer en ces termes: « Témoigne, ô mer de Mayombé, témoigne que je suis l'esclave du Pardonnateur et le serviteur de l'Elu (Psl). Témoigne que je ne flatterai jamais un idolâtre et que je demeurerai l'ami intime de celui qui m'a entouré d'honneur ».

C'était en 1895. Une épreuve accueillie avec joie donc. Le contre-pied de la facilité pour emprunter un chemin parsemé d'embûches. Le droit chemin de Dieu avec ses exigences, ses privations, ses sacrifices. "Le service que je rends au Prophète m'interdit d'être au service des rois pour leurs largesses", a-t-il très tôt averti. D'ailleurs sa ligne de conduite suit quatre principes fondamentaux: la foi en Dieu, l'imitation du Prophète Psl, l'apprentissage du Coran, et l'amour du travail. «Travaillez comme si vous ne deviez jamais mourir et priez Dieu comme si vous deviez mourir demain», ajouta Bamba suivant à la lettre des recommandations divines.

C'est pourquoi, comme le dit Serigne Moussa Ka, Bamba accorda autant d'importance non à son retour, mais à son départ d'exil, en ayant une claire conscience de ce qui l'attend. Le message est sans ambages. Il se veut universel : pas de réussite sans don de soi, sans foi mille fois perpétuée. Sa foi inébranlable a triomphé face à la puissance des armes.

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Dignité, générosité, pardon

Engagement et foi mais aussi pardon et générosité. Le voilà qui plaide pour tous les musulmans, pour toute l'humanité. "Sauve-les, pardonne-leur, sois bienveillant envers eux et ne leur tiens point rigueur de leurs nombreux péchés. Ô Toi L'unique ! S'ils T'ont certes désobéi par négligence, reste-t-il cependant que, dans leur cœur, ils ne T'associent à personne", prie-t-il dans Mathlabou Chifaa-i(La recherche du remède). Maintenant, au-delà de cette force de reconnaissance, il est aujourd’hui plus que jamais nécessaire de s’inspirer résolument de lui pour changer notre vécu en interrogeant notre façon de faire. Ce qu’a compris le président Mamadou Dia. Son discours lors du Magal de septembre 1957 avait bien campé le débat.

« Touba est donc bien pour nous le lieu où ont triomphé l'esprit de résistance et la dignité sénégalaise. A qui serait tenté de l'oublier, Touba rappelle que l’estime, même celle des adversaires, se mérite ». Avant de poursuivre : Elle ne vient pas récompenser la servilité ou l'acquiescement systématique. Elle reconnaît la valeur de qui s'affirme, dans l'opposition s'il le faut. « Toute personnalité qui maintient son intégrité, obtient sa reconnaissance. La dignité, qu'elle soit d'un homme ou d'un peuple, se conquiert, mais ne s'achète pas », estime Dia.

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